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Symphonie Atomique, Étienne Cunge

Who Stays Behind – The Sleeping (extrait de l’album Questions and Answers)

Rien de nouveau si je vous dis que j’aime beaucoup le travail éditorial de CRITIC et donc rien d’étonnant non plus à ce que je vous dise que j’ai accepté avec un très grand plaisir un SP de leur dernier-né ; d’autant plus avec la couverture d’Aurélien Police – évidemment sublime – la réputation du précédent roman de l’auteur, et les quelques informations que je m’étais permis d’engranger à propos du présent ouvrage.
Une fois de plus, ma politique d’en apprendre le minimum sur les romans que je lis a priori m’a mis dans une position un peu délicate. Disons le clairement, j’avais mal interprété les éléments à ma disposition, et j’étais de fait mal préparé à lire ce que j’ai lu. Et de fait, il m’a fallu un peu plus de temps que d’habitude pour terminer un roman que j’aurais terminé en deux fois moins de temps, sans que sa qualité ne soit jamais un réel souci. Disons que malgré l’indéniable et impeccable alignement de ses ambitions et de son exécution, ce n’était absolument pas le bon moment pour moi de le lire ; tout comme si j’avais mieux su de quoi il était exactement question, je n’aurais peut-être pas pris le risque de lire ce roman.
Pour être clair, mon seul et unique problème avec Symphonie Atomique, c’est à quel point il est dur.
Mais j’y reviendrai dans la chronique. Allons-y.

Le futur proche, après que le monde entier ait dû faire face aux cinq Grandes Plaies successives dont le réchauffement climatique est la cause centrale, l’effondrement n’est plus une hypothèse, mais une réalité avec laquelle composer. Le monde s’est réorganisé tant bien que mal et se prépare à la suite, avec plus ou moins d’optimisme et de réussite. Puis les événements se précipitent une nouvelle fois, sans que personne n’arrive à identifier exactement la source des perturbations qui agitent cet étrange monde d’après. L’avenir de notre planète dépend maintenant des destins croisés de Juan, Agathe, Ashkat et tant d’autres de ces acteurs et actrices inconnu·e·s ou insoupconné·e·s.

Commençons par l’évidence, et ce qui m’a donné tant de mal, à savoir le cadre de cette histoire. Si je ne suis plus tout jeune, je subis quand même de plein fouet depuis des années l’accumulation de nouvelles terrifiantes sur l’état du monde, qui ne m’aident pas à demeurer optimiste quant à son devenir, et de fait, au mien. Et donc, forcément, lire un roman qui, dans son introduction en particulier puis tout le fil de son récit, fait la description détaillée et crédible de ce que l’effondrement pourrait donner, ça ne fait rien d’autre que nourrir mon éco-anxiété. Très sincèrement, j’ai dû encaisser la première moitié de ce roman plus durement que beaucoup d’autres séquences violentes dans d’autres romans avec des ambitions plus brutales ; tout simplement parce que je n’y ai trouvé aucun divertissement, aucune catharsis. C’était trop réel, et de fait terriblement angoissant, à l’image du monde que me décrivait Étienne Cunge, et je ne parle pas des implications des pans du roman qui versaient plus volontiers dans le techno-thriller géopolitique, parce que là aussi, j’ai senti ma gorge se serrer plus d’une fois.

Pour être absolument clair, le déroulé de ce roman est impeccable, tant dans sa construction que dans ses articulations ; ce qu’il raconte sonne juste, bien au delà des hypothèses liées au réchauffement climatique. Il est autant question de montrer ce qu’on sait de ce qui va se passer que de faire des conjectures sur ce qui pourrait se passer après ça. Et c’est absolument déprimant à tous les étages, parce que terriblement réaliste et cohérent avec la réalité actuelle. Entre les séquences de jeux d’échecs diplomatiques en 5 dimensions, les petits récits d’introduction à chaque chapitre qui relatent des expériences individuelles en lien avec l’effondrement ou tous les éléments disséminés dans le récit faisant tapisserie globale de ce monde d’après, il y a pour moi surtout une idée qui surnage : on n’apprendra jamais. Alors peut-être que mon interprétation des événements actuels et mon pessimisme désabusé sont aussi à blâmer, mais j’ai quand même la forte impression qu’Étienne Cunge est encore plus désespéré que moi, que ce roman est avant tout une démonstration de l’idée que l’Humanité est accro à ses propres vices et ne saura jamais s’en détacher, quand bien même cela devrait logiquement la mener à sa perte définitive. Et bon bah… C’est pas ce que j’ai envie de lire, moi, j’avoue. Le monde réel me suffit pour être convaincu qu’on va tou·te·s crever dans d’atroces souffrances.

Alors bon, quand même, il y a eu du plaisir de lecture, hein, ne nous méprenons pas ; surtout dans la large partie centrale du roman, qui décrit par le menu tous les événements croisés qui mènent à sa conclusion, et où le techno-thriller prend une part beaucoup plus large que les réflexions autour de la perspective écologique, qui passe à l’arrière-plan. Les personnages étant profondément humains, pétris de paradoxes et de contradictions aussi compréhensibles que complexes, jouets de la fatalité, l’empathie est assez facile à ressentir (à l’exception d’une scène pour laquelle je réserve encore mon jugement), et on a envie de savoir où tout ça va les mener. De la même manière, par un reflexe d’identification plus large, malgré tous les éléments qui auraient tendance à prouver qu’on va collectivement mourir et qu’on l’a quand même bien cherché, on a un peu envie d’y croire, quand même. Alors on s’accroche. C’est sans doute ce qui m’a amené jusqu’au bout, finalement sans trop de peine, entre un réel plaisir à lire une architecture de récit très solide, les trajectoires de ces personnages convaincants et la curiosité – un peu morbide – de savoir quel conclusion Étienne Cunge allait donner à toute son histoire. Et aussi parce que souvent, pour moi, la fin justifie plus clairement que tout le déroulé la morale à retirer d’un récit, surtout de ce genre là. Sur cette dernière, je ne dirai rien, mais vous inviterai évidemment à vous faire votre avis par vous-mêmes.

Verdict… Oui, indubitablement, c’était très bien. Le message porte, avec ce que j’oserais appeler un excellent équilibre entre le choc et l’argumentation plus posée pour faire une démonstration assez implacable des idées d’Étienne Cunge. Après, plus subjectivement, je me verrais mal conseiller ce roman à qui que ce soit sans être absolument certain que l’éco-anxiété n’est pas un problème d’abord ; si j’ai pu assez vite passer à autre chose c’est aussi parce que j’ai du prendre mon temps de mon côté et que je dois de toute façon tellement compter avec mes propres problèmes que cette lecture n’était qu’une goutte d’eau dans la piscine de mes angoisses. Et puis oui, quand même, c’était très bien. Alors j’ai su passer outre sans trop de problème, finalement.
Nan, le seul problème, c’est que quelque part, Symphonie Atomique est trop vrai pour être beau, et qu’il a sans doute, avec moi, prêché un converti. J’aimerais vraiment qu’il trouve un public plus adapté que moi pour pouvoir en rendre compte avec des yeux un peu moins fatigués, ou plus enthousiastes quant à ses idées neuves, qui sont bien présentes en quantité comme en qualité, mais pas assez vibrantes et joyeuses pour qu’elles m’aient plus marqué que le reste. Ce n’était pas le roman dont j’avais personnellement besoin ou envie au moment de sa lecture, et je le regrette.

Au plaisir de vous recroiser.
En attendant, que votre avenir soit rempli d’étoiles. 😉

6 comments on “Symphonie Atomique, Étienne Cunge

  1. JEAN PIERRE FREY dit :

    Pour vous lire régulièrement je vois en ce moment l’expression de grosses angoisses que j’espère vous surmonterez tant que cela est possible moi cunge est un auteur que j’avais lu auparavant avec « antarticas » à Rivière Blanche traitant il me semble des aspects semblables à vous lire

    jean pierre frey

    Aimé par 1 personne

    1. Laird Fumble dit :

      C’est très gentil merci, je devrais m’en sortir : je m’en sors toujours. 🙂

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