
The Wolf – SIAMES (extrait de l’album Bounce into the Music)
Rien de bien surprenant, à force, qu’une envie de lecture pas trop prise de tête et avec une certaine certitude de succès me mène à lire du Jeanne-A Debats. D’autant moins surprenant depuis ma lecture enthousiaste de la trilogie Testament et ma découverte positive de l’Eschatologie du vampire. Il fallait simplement que je complète ma collection avec cette Métaphysique du vampire ; que j’aille jusqu’au bout de mon exploration des aventures de ce bon vieux Navarre. Et puis pour une fois, j’étais paré de tous les côtés, aucune chance d’être déçu ou désagréablement surpris, normalement, je savais vraiment à quoi m’attendre.
Bon, j’avais un peu tort, mais rien de grave, vous allez comprendre. Dans l’ensemble, je me suis tout simplement régalé.
Notons d’emblée que le timing de ma lecture n’était pas le plus heureux du monde, puisqu’elle a été entrecoupée à son tiers d’une semaine complète sans être poussée une ligne plus loin : la dépression, c’est d’autant plus moche que ça ne fournit pas de préavis. Mais, et c’est à mettre au crédit de l’ouvrage du jour : j’ai pu le reprendre une fois mes soucis passés en toute tranquillité sans craindre d’avoir perdu le fil ou le goût du travail littéraire bien fait. Il faut dire que comme prévu, j’étais en terrain familier, et en dehors d’un seul (tout petit-petit) reproche à lui faire, Jeanne-A Debats et son filou de Navarre m’ont donné précisément ce que je souhaitais ; des aventures gouailleuses et du vampirisme post-moderne qui s’amuse autant de ses tropes qu’il les perpétue intelligemment.
Mais j’ai admis avoir été surpris, et ça va de pair avec mon léger reproche : pendant un temps, je me suis dit que ce roman allait potentiellement être long à lire, devant suivre le flux ininterrompu des pensées de notre vampire sale gosse, sans respirations dans le récit ou presque. Même pas un semblant de chapitrage, à peine quelques sauts de paragraphes significatifs, j’avoue que ça donnait à l’ensemble une certaine lourdeur ; pas dénuée de consistance ou de cohérence à l’aune de ce qui était raconté, certes, mais quand même une impression de frénésie un poil fatigante.
Mais que ce petit reproche soit balayé par ma deuxième surprise, arrivé à un certain stade de l’ouvrage : ce bouquin ne contient pas qu’un seul récit, mais plusieurs. Alors certes, l’absence d’une rythmique un peu plus confortable demeure dommageable, mais au moins, le problème n’allait pas demeurer, d’autant plus qu’après cette dense novella, le reste de ce nouveau fix-up – j’aurais dû m’en douter, j’apprends lentement parfois – est joyeusement rythmé par des nouvelles beaucoup plus intenses.
Et que dire que je n’ai pas déjà dit par ailleurs au sujet des ouvrages de l’autrice consacrés à son AlterMonde, finalement ? Une telle exploitation malicieuse des tropes fantastico-monstrueux, c’est absolument ma came, d’autant plus quand ça s’accompagne de l’étude d’un personnage aussi fascinant et attachiant que Navarre (non, y a pas de faute). Même si je signalerais ici que ça va logiquement un peu plus loin que les autres fois, étant donné que cette fois, il n’est quasiment question que de notre vampire au cœur bien à lui ; et donc surtout des ramifications de son statut si particulier. Autant dire que le titre de l’ouvrage est particulièrement malin à mes yeux.
Ce que je veux dire par là, c’est qu’au delà d’en apprendre plus au sujet de notre protagoniste et narrateur, lisant dans ce recueil des histoires expliquant plus ou moins certains mystères soulevés dans d’autres occurrences de l’univers de Jeanne-A Debats, je crois que l’idée était surtout de plonger un vampire de cet univers dans tout plein de situations diverses pour voir ce qui se passerait. Et si donc, fort à-propos, on explore la psyché si singulière de ce personnage complexe et profond, je trouve que les récits proposés par l’autrice trouvent surtout leur sel dans l’idée d’explorer les conséquences de l’existence des vampires et de leurs pouvoirs dans des circonstances pas toujours associées avec cette figure singulière de l’Imaginaire. Typiquement : qu’est ce que ça donne, un vampire qui doit aller dans l’espace pour résoudre un crime politique en qualité de détective ? Réponse : une très bonne nouvelle, située en fin d’ouvrage, qui m’a donné très envie de d’en savoir beaucoup plus tout en me laissant parfaitement satisfait à sa conclusion.
Du travail bien fait, donc. Pour moi qui savais déjà aimer le travail de Jeanne-A Debats, en particulier dans son univers de l’AlterMonde, il n’y avait pratiquement aucune chance d’être déçu ; je ne l’ai pas été. Efficace et malicieux, fournissant autant de bonnes idées et de concepts que d’histoires intéressantes en elles-mêmes, tout en explorant plus avant un univers qui m’était familier et dont je suis tant friand que demandeur, le cocktail était impeccable. Ce bouquin constitue à mes yeux autant une excellente porte d’entrée à l’univers de l’AlterMonde qu’un complément gourmand à des yeux déjà un tant soit peu habitués. Top cool, deux pouces en l’air.
Au plaisir de vous recroiser.
En attendant, que votre avenir soit rempli d’étoiles. 😉
