Comment on produit un bilan de l’année écoulée sur un blog comme le mien ?
Vaste question s’il en est. Je ne suis pas du genre à participer à des challenges ou à produire des tops, ni à mettre beaucoup de visuels dans mes chroniques, mon rythme est quand même bien éclaté au gré de mes humeurs, et on ne peut pas dire que je sois du genre à bien m’intégrer dans un paysage qui me pré-date, avec quelques traditions ou habitudes qui m’échappent.
De fait, faire le bilan, c’est vraiment pas quelque chose qui me ressemble vraiment. Mais je sais pas, je me suis dit que pour une année aussi violemment singulière que 2021, ça s’imposait, par envie autant que par besoin. Pour bien me rendre compte de tout ce que j’ai traversé en 12 mois, et peut-être mieux pouvoir anticiper ce qui m’attend pour les 12 suivants ; en votre compagnie, je l’espère.
Alors bon, je vais faire les choses à ma manière, comme d’habitude, c’est à dire sans trop de préparation, et de façon sans doute beaucoup trop verbeuse, sans images d’illustration. Question de transparence et de sincérité, je dirais. Je vais prendre un point de départ aussi arbitraire que logique, et on verra bien de là où mes errances mentales nous mènerons, si vous acceptez de me suivre.
Et il paraît que le début, c’est toujours un bon endroit pour commencer. Alors 2 janvier 2020, 24 vues du mont Fuji, par Hokusai. Un U-H-L surprenant, qui incidemment, me montre, je crois, le chemin pour ce qui sera sans doute un bilan d’humeurs. Parce qu’en repensant à cette lecture et à la chronique qui a suivi, je dirais que cette année, ce que j’ai le plus fait, c’est apprendre. Avec ce texte de Roger Zelazny, avec qui j’ai toujours une relation littéraire difficile, j’ai appris qu’on pouvait, qu’on devait, laisser des secondes chances aux auteurices et à leurs textes. Qu’une inimitié littéraire n’est jamais définitive, qu’on peut toujours changer, d’un côté comme de l’autre, et qu’un même univers de lettres peut résonner différemment à quelques temps d’intervalle, au gré de nos métamorphoses, de l’affinage de nos sens et de nos connaissances. Cette année plus qu’aucune autre, j’ai appris et accepté l’idée que certaines de mes premières émotions de lecteurs pourraient ne pas se confirmer à une relecture, ou que je pourrais appréhender complètement différent un texte déjà éprouvé auparavant.
J’ai appris, par dessus tout, qu’il n’y a pas d’absolu ailleurs que dans nos têtes. J’ai été taraudé toute l’année, suite aux régulières escarmouches souvent stériles sur les réseaux du fandom Imaginaire francophone, par une idée de texte que j’aurais titré « La faiblesse de l’absolu ». Je ne l’ai jamais écrit, parce que je n’ai jamais trouvé les bons mots à mettre dans le bon ordre et avec le bon ton. J’ai essayé d’éclater son concept, d’en mettre un peu partout, histoire de continuer à construire l’idée dans ma tête aussi précisément que possible. J’ai juste voulu exprimer ma profonde lassitude envers les gardien·ne·s du temple, ces gens qui se pensent l’élite et qui jugent tout en fonction d’un standard cosmique qui n’existe que dans leurs esprits tristement étriqués, s’enfermant progressivement dans un conservatisme littéraire qui m’est insupportable. Insupportable parce qu’il laisse des gens, avec leurs goûts et leurs envies, sur le bord de la route. Et cette simple idée me hérisse.
J’en ai croisé, pourtant, des textes qui n’étaient pas pour moi. Mais précisément, je crois que j’ai aussi appris à mieux moduler mes sentiments pour donner à ces textes qui ne me parlaient pas quelques chances de parler à d’autres personnes prêtes à les entendre clairement. Je pense sincèrement qu’en dehors de l’alignement des ambitions et des moyens d’un texte, pas grand chose ne doit compter dans le jugement qu’on en fait, même si ce simple concept recouvre énormément de détails qui s’intriquent dans un ensemble terriblement complexe à expliciter. Mais précisément, c’est là que ce passionnant se niche ; trouver, au delà de mes sentiments, les intentions et leurs traductions en choix dans le texte. Puis nouer et dénouer les deux au mieux.
Là aussi, j’ai appris. Je pense que cette année est celle où j’ai définitivement su trouver mon rythme et mon style en tant que chroniqueur de mes lectures, sachant m’écouter au mieux pour ajuster mes exigences en fonction des textes dont je parlais, pour éviter les prises de têtes tout en sachant laisser cours à mes verbiages les plus intenses. Je pense sincèrement avoir produit quelques excellentes chroniques cette année, autant sur des œuvres que j’ai aimées que d’autres qui ne sont pas parvenues à me séduire ; toujours en conservant une réelle transparence et une honnêteté intellectuelle à laquelle je tiens beaucoup, autant qu’à la cohérence de ma ligne éditoriale. Et si je regrette quelques maladresses en dehors du blog, je pense avoir le droit à une réelle fierté quant au fait que je n’ai provoqué aucun remous avec ce dernier seul, récoltant même quelques lauriers inattendus venant d’auteurices dont les œuvres n’avaient pas été choyées. De l’autre côté, savoir que j’ai réussi à émouvoir des auteurices dont les textes m’ont vraiment beaucoup plu constitue la base d’un cercle vertueux que je ne me lasserai jamais de perpétuer.
À cet égard, malgré ma propension à difficilement jouer en groupe, je dois dire que la meilleure partie de cette année a été la consolidation assez définitive dans mon cœur du plaisir que je peux avoir à partager avec d’autres bloggeureuses et maint·e·s auteurices ou Maisons d’Édition qui me font continuellement l’honneur d’inclure mon travail dans le parcours de vie de ces œuvres qui viennent à croiser mon chemin. Car si les chiffres de ce blog sont dérisoires par rapport à de plus grands acteurs du réseau que moi, je demeure fier d’avoir su bâtir/m’intégrer dans – si vite, finalement – une réelle communauté, fidèle et loyale dans les meilleurs sens des termes. Où la discussion contradictoire comme consensuelle est aussi possible que globalement apaisée et constructive, bien loin des querelles mesquines qui bien trop régulièrement viennent perturber un fandom qui n’a ni envie ni besoin de ça. Et pour autant, si encore une fois, j’ai effectivement mal géré quelques situations regrettables, je ne regrette surtout pas d’avoir appris au contact d’un paquet de gens formidables à mieux appréhender les difficultés que vivent beaucoup de gens, dans et en dehors des livres que je lis. Et là encore, je suis assez fier d’avoir appris à plus clairement me positionner d’une façon que je pense et espère cohérente et productive, pour pouvoir aider au mieux à améliorer la situation à mon humble échelle.
Malgré toutes les galères, il faut bien dire que ç’a été une bonne année à vivre dans ce coin virtuel. J’ai quand même lu un paquet de choses fabuleuses, me suis redécouvert des envies tout en dépoussiérant beaucoup de mes certitudes, et surtout, j’ai partagé tout ça avec des gens qui m’ont rendu au centuple. Rien d’autre qu’une chance et un honneur.
Je ne ferai pas de listes de toutes les personnes formidables avec qui j’ai pris et continue encore à prendre un plaisir continu autour des livres et tout ce qu’ils ont à nous offrir, parce que vous êtes trop nombreux·ses et que j’ai peur que le moindre manquement vexe.
Mais sachez que je vous aime, et que malgré mes doutes, malgré mes peurs, et malgré le futur incertain, ce blog continuera tant que j’aurais l’énergie pour l’alimenter.
Un toast, donc, à ce qui a été bon et à ce qui le sera encore.
Au plaisir de vous recroiser.
En attendant, que votre avenir soit rempli d’étoiles.
Mais nous aussi on t’aime 😡
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Évidemment ce smiley était complètement involontaire, je sais absolument pas pourquoi : + x ça fait un machin pas content
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C’est Skynet qui essaie de semer la zizanie, sans aucun doute.
Merci l’ours. ❤
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Je trouve ton billet plein de sagesse et surtout empli d’un recul salutaire dont tout le monde n’est pas capable ou n’a pas volonté à s’astreindre.
Comme toi, j’ai appris à donner des secondes chances à certain(e)s auteur(e)s, voire genres…
Recevoir des messages, des remerciements ou des avis positifs de personnes dont on a apprécié les livres est toujours gratifiant 🙂
Je te souhaite un bon réveillon et une nouvelle année riche en lectures et rencontres, virtuelles ou non.
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Merci beaucoup. ❤
Tout plein de bonnes choses pour toi aussi, bonnes fêtes. =)
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Merci 🙂
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J’ai pris grand plaisir à te lire cette année et je le prendrai encore en 2022. En espérant pouvoir se croiser plus longuement cette année.
L’elfe te souhaite une belle année, avec toute la sérénité qu’il te faut. Que ton avenir soit radieux.
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Merci beaucoup, Nos souhaits convergent. ❤
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