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Fragments – 7

Drawguns : 1

[…]

Jack avait quelques verres en trop dans le système pour son propre bien, et il le savait parfaitement, mais il s’en foutait complètement ; son propre bien ne l’intéressait plus depuis très longtemps. À vrai dire, il était très fatigué, et l’après-midi n’était qu’à peine entamée.
Il se brûla les yeux au soleil qui semblait lui aussi peiner à continuer sa course, chauffant et asséchant l’atmosphère de la ville. Paresseusement, mais avec une cruelle efficacité, comme à son habitude à cette saison. Un premier pas lourd dans la terre battue de l’avenue principale souleva un épais nuage de poussière qui vint se coller sur le pantalon de Jack. Il n’esquissa même pas un geste pour essayer de le nettoyer, ses prochaines enjambées feraient pire de toute façon. Et c’était pas comme s’il en avait quelque chose à foutre d’être présentable.
Il se planta devant le saloon et s’étira longuement, histoire de ramener quelques sensations dans ses membres fatigués, puis enfonça ses doigts dans sa barbe pour gratter sa peau sèche et parcheminée, le temps de déterminer son prochain mouvement et résister à l’envie de simplement retourner boire.
Un éclat de voix dans lequel il reconnut son nom, quelque part à sa droite, décida pour lui.
Il se retourna lentement avec un soupir de lassitude ; l’intonation était familière, présageant clairement des événements à venir. Il voulait croire que cette fois serait la bonne, mais il savait aussi qu’encore une fois, les circonstances ne lui seraient pas favorables. Il avait déjà envie de pleurer, il se sentait épuisé, mais sentait aussi son corps commencer à se tendre, à exécuter les mêmes mouvements qu’il avait exécutés si souvent de la même façon.
Son bras gauche n’était pas encore sous l’influence du sortilège ; il tenta de le lever dans une supplique silencieuse, la paume en avant, signifiant clairement qu’il n’avait pas envie de jouer ce jeu là une fois de plus. Mais son ennemi du jour, comme toujours, ne voulait rien entendre et se mettait déjà en place au milieu de la voie, son revolver bien en évidence à sa hanche, le souffle court et le rictus triomphant.
Un petit con de plus qui voulait se faire une réputation à ses dépens, trop propre sur lui, trop jeune, trop naïf, trop bercé aux légendes et aux rumeurs. Qui allait sans doute mourir sans comprendre de quoi il avait été victime.
Jack commençait déjà à entendre le rire de l’Autoch résonner dans un coin de son crâne. Ce foutu rire qui allait enfler et enfler tant qu’il n’aurait pas appuyé sur la gâchette une nouvelle fois, le rendre fou tant qu’il n’aurait pas accepté, une fois de plus, sa malédiction.
Son bras gauche était déjà retombé en position de duel, son corps entier ne lui répondait plus.
Mais il ne résisterait pas, aujourd’hui. Il n’avait pas la force de subir la brûlure de ses muscles jusqu’à son âme, de supporter la douleur et l’humiliation plus de quelques secondes.
Il lui suffit de quelques pas de plus pour être en position. Ses yeux lui obéirent les quelques secondes nécessaires pour qu’il dégaine, tire et abatte l’ambitieux de trois balles en plein cœur, sa signature. Il ne pouvait plus les regarder, il ne pouvait plus le supporter.
Ses mains saisirent seules son cran d’arrêt dans sa poche et gravèrent une nouvelle encoche sur la poignée de son revolver. Le sortilège le força à regarder, cette fois, mais il se refusa à compter les marques qui commençaient à manquer de place. De toute manière, il ne voyait presque rien à travers la brume de larmes qui lui couvrait les yeux.
Il se laissa tomber à genoux pour attendre la dernière étape de ce sombre rituel, celle qu’il haïssait le plus. Le rire avait fini de résonner maintenant, la migraine qui s’ensuivrait inévitablement commençait déjà à prendre ses quartiers, mais ce n’avait jamais été le pire.
Le pire, c’était le murmure. Toujours cette même voix rocailleuse, détruite par le tabac, l’alcool et la rancœur.

« Tu veux être le meilleur, Jack ? Tu le seras. Toute ta vie. Mais tu en paieras le prix, je te le jure. »

[…]

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