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U-H-L #46 – Le Dernier des ainés, Adrian Tchaikovsky

Verrückt – Eisbrecher (extrait de l’album Die Hölle muss warten)

Parfois, j’ai quand même un don assez singulier pour sélectionner mes lectures avec un à-propos d’une ironie équivalente à sa pertinence. Quand ça arrive, considérant que je ne sais parfois que le strict minimum au sujet des ouvrages se faisant concurrence sur la PàL, je savoure plus qu’autre chose la joie ainsi née du hasard.
Parce que bon, quand même, enchaîner deux lectures ayant comme protagoniste un·e anthropologue médiocre sur une planète subissant de plein fouet les contaminations socio-culturelles issues de leurs errements, je trouve que c’est pas banal.
Et alors, puisque j’évoque cette fortuite et cocasse coïncidence, autant être transparent dès maintenant : j’ai choisi de lire un UHL sans savoir de quoi il était question dedans parce qu’après la grosse déception des Nomades du Fer, j’avais avant tout besoin de quelque chose de plus léger en terme de volume. Et je n’ai pas choisi la lecture du jour avec la plus grande des confiances, étant donné que ma première rencontre avec son auteur Sur la route d’Aldébaran ne s’était pas super bien passée. Mais je me suis dit que le plus tôt je m’y mettais, le mieux ce serait en cas de nouvelle mauvaise passe littéraire, dans l’attente d’autres références plus optimistes. Et voilà, c’est fait.
Une intro vachement longue pour une mise en contexte super importante, je crois. Parce que je suis pas absolument certain de la pleine et entière validité de mes sentiments au sujet de ce Dernier des ainés. Ou du moins, pour être plus précis, si je suis assez sûr de moi quant à mon ressenti immédiat, je ne suis pas complètement confiant sur le fait que son contexte de lecture n’ait pas eu une trop grosse influence sur moi.
Mais bref, je vais expliquer tout ça dans ce qui suit. L’essentiel, si vous avez la flemme de lire la suite, c’est que j’ai absolument adoré ce bouquin. Je crois même qu’il est rentré dans mon top 5 UHL, pour vous dire. Le reste n’est que détails.
Je vais m’épancher dessus, évidemment, mais quand même.

Alors voilà, évacuons directement mon petit problème avec mes perceptions. Comme je l’ai déjà dit et le redirai sans vergogne à l’avenir parce que c’est important : le timing d’une lecture est indissociable de notre appréciation. Et comme je l’ai dit dans l’intro, lire deux bouquins de suite avec un·e anthropologue comme protagoniste, d’autant plus s’intéressant à ses relations extra-professionnelles avec la population locale, quand même, c’est statistiquement trop improbable pour que ça ne s’accroche pas à l’inconscient comme un chewing-gum humide à une semelle de chaussure. Et comme en plus, mon esprit a quand même une tendance assez forcenée au turbinage non sollicité, forcément, j’ai été victime d’un syndrome comparatif assez puissant. Et j’ai beau savoir et prêcher que comparaison n’est pas raison, je n’ai jamais pu complètement m’empêcher de dresser des parallèles entre Le Dernier des ainés et Les Nomades du Fer ; et donc de constater qu’à mes yeux, le premier faisait tout mieux que le second ou presque. Et croyez moi que je déteste enfoncer une œuvre pour en encenser une autre, je trouve ça même assez minable de ma part ; mais l’impression m’est trop chevillée au corps pour que je fasse l’impasse dans cette chronique. Pour être plus juste et me départir de cette façon de faire, disons plutôt qu’Adrian Tchaikovsky, à partir d’éléments de départ très similaires à mes yeux, a su trouver une manière de procéder qui convenait nettement plus à mes goûts, ici.

D’abord, conceptuellement parlant, je dois bien dire que j’ai été séduit, le récit se construisant autour de ses deux protagonistes et de leurs narrations séparées pour nous rendre compte directement dans le texte du choc culturel entre les deux ; notre héros vivant clairement à nos yeux dans un contexte science-fictif, notre héroïne quant à elle apposant un filtre de fantasy sur toutes ses perceptions. Et l’auteur, à force d’efforts à tous les niveaux, nous rend parfaitement compte de toutes ces différences d’appréhension de la réalité par le prisme de la langue, que ce soit dans les dialogues ou dans les oppositions frontales de lexique d’une chapitre à l’autre, selon le point de vue qu’il nous offre à lire. C’est super malin, et c’est admirablement bien dosé, laissant la place à certaines interprétations libres ou à certaines fixations essentielles à la bonne compréhension de l’histoire, sans jamais laisser le moindre espace à la confusion. Pour tout dire, je trouve même qu’avoir réussi à instiller autant d’altérités linguistiques et culturelles dans un récit aussi court tout en parvenant à nous raconter une histoire aussi dense, avec personnages hétéroclites et généreux à l’appui, c’est assez brillant.

Alors après, pour nuancer ma poussée comparative, force est de constater que l’intention de l’auteur ici est plus de raconter de l’intérieur les conflits intérieurs d’un mec un peu médiocre qui apparaît pour beaucoup plus important qu’il n’est à cause d’un changement radical de paradigme que de dresser un bilan métaphysique de la fonction d’anthropologue à l’aide d’un contexte de science-fiction plus ou moins poussé. Mais de fait, avec cette plongée intimiste dans la psychologie de ce pauvre type complètement paumé et victime des circonstances, se débattant avec ses devoirs et ses envies, confronté à un monde qui n’est pas le sien, mais sur lequel il a potentiellement une emprise monstrueuse, Adrian Tchaikovsky pose de façon concise et efficace des questions dont j’aimerais bien avoir les réponses un jour ; je trouve qu’il a trouvé une excellente distance pour raconter son histoire. Oui, je tourne un peu en rond autour de cette idée, depuis quelques temps, je dois bien admettre qu’elle me fascine ; je me trouve souvent à penser à des concepts un peu aléatoires en me demandant exactement quelle méthode narrative serait la meilleure pour les raconter. Et j’aime beaucoup tomber sur des bouquins dont je me dis qu’ils n’auraient probablement pas pu être mieux raconté que de la faon dont je les ai découverts.

Bref, bref, bref. Si j’ai bien trop conscience que mon ressenti est sans doute un petit peu – a minima – influencé par une sorte d’envie de rebond littéraire, et que je dois à mes ambitions d’honnêteté intellectuelle de ne pas me voiler la face à ce propos ; il demeure que ce Dernier des ainés est une complète réussite à mes yeux. Entre l’entremêlement de science-fiction et de fantasy confirmant encore une fois qu’à mes yeux l’Imaginaire n’est qu’un gigantesque et merveilleux gradient non euclidien, les personnages touchants et le sublime jeu littéraire autour des perceptions, notamment linguistiques, j’aurais de toute manière trouvé mon compte dans cette enthousiasmante novella, trouvant logiquement sa place au panthéon de la collection Une-Heure-Lumière à mes yeux : ce qui n’est pas peu dire. Là, je comprends mieux l’enthousiasme autour d’Adrian Tchaikovsky. Et j’ai hâte d’en lire plus pour confirmer le mien.

Au plaisir de vous recroiser.
En attendant, que votre avenir soit rempli d’étoiles. 😉

2 comments on “U-H-L #46 – Le Dernier des ainés, Adrian Tchaikovsky

  1. tampopo24 dit :

    J’ai énormément aimé les romans de l’auteur, j’étais donc forcément tentée par ce nouveau format. Ton avis enthousiaste et +, et ce que tu dis sur l’aspect linguistique de la chose va me faire le mettre dans le haut de ma wishlist de fin d’année 😀

    Aimé par 1 personne

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