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Ciel sans Étoiles T2 – Compassion, Yoann Dubos

Whiplash – Black Math (extrait de l’EP Point Blank)

Dire que j’attendais Compassion de pied ferme serait sans doute un de plus gros euphémismes que je pourrais prononcer cette année. Ma lecture d’Ambition avait été une surprise de taille, magnifique, et les promesses qui y avait été formulées par Yoann Dubos m’avaient mis la bave aux lèvres. Il fallait absolument qu’au moins une partie d’entre elles soient tenues pour que je puisse m’estimer satisfait. Ajoutez à cela le confinement qui m’a empêché de mettre la main dessus aussi tôt que prévu, et vous avez une petite idée de mon impatience, et, bien entendu, de ma crainte d’être déçu.
Je ne vais pas faire semblant une seule seconde, j’ai été tout sauf déçu, au contraire. Encore une fois, c’était très bon, et pas seulement pour les raisons que j’aurais pu le plus facilement anticiper ; ce qui ajoute encore au plaisir général. Et je m’en vais vous expliquer pourquoi.

Nul besoin de résumé, on reprend à peu près là où on s’était arrêté, avec une petite ellipse dans laquelle prennent le temps de s’installer une partie des nouveaux enjeux qui vont nous intéresser pendant ce volume, ainsi que la plupart de ceux qui n’avaient pas encore été résolus dans le précédent. Autant l’annoncer d’emblée, une bonne partie des compliments que j’avais eu à faire sur Ambition peuvent se répéter ici sans la moindre modification ; une constance admirable dans la qualité, que ce soit dans la construction des personnages, dans leurs échanges ou dans l’intrigue qui lie l’ensemble, c’est toujours aussi rythmé et fun, et ça gagnerait même encore un peu en clarté au milieu de la frénésie des événements, du tout bon. Sur la forme, on ne change rien, on ne change pas une équipe qui gagne : ellipses, flash-backs, changements ponctuels de point de vue, Yoann Dubos demeure malicieux dans l’égrenage d’informations et l’ironie dramatique. Nous croyons régulièrement en savoir un peu plus que ses personnages, pour finalement comprendre que non, mais en fait oui, mais pas vraiment, et c’est un sentiment assez exaltant, il faut bien le dire. Comme pour Ambition, la principale qualité, c’est bien que nous sommes en présence d’un furieux page turner, où pas une page ou presque n’est exempte d’un morceau de dialogue savoureux ou d’une information importante, à la fois pour l’avancée de l’intrigue, l’arc narratif d’un personnage ou la construction de l’univers. Il y a toujours quelque chose qui donne envie d’avancer, et surtout mon kiff personnel le plus prononcé, les personnages. Anciens comme nouveaux, ils brillent par leurs souffles respectifs, avec une mention spéciale pour la réussite de Trémor, chez les nouveaux, qui, on le notera, a bien inspiré Aurélien Police pour sa magnifique illustration de couverture. À cet égard, personne n’est surpris.

Mais il ne s’agit pas de simplement répéter une formule ayant fait ses preuves, et c’est bien là que je salue avec encore plus d’enthousiasme la performance ; Yoann Dubos, à plusieurs égards, a su prendre des risques là où ils n’étaient pas nécessaire, mais qui se révèlent aussi judicieux que bienvenus. D’abord sur le fond ; comme je l’ai déjà dit, je pense qu’un des gros avantages de la littérature jeunesse – young adult en l’occurrence – c’est de pouvoir s’affranchir de certaines contraintes, notamment en prenant moins de temps pour expliquer certains détails. Sans aller jusqu’à se servir de jokers systématiques, la littérature jeunesse peut, je crois, plus souvent affirmer des éléments de son récit sans avoir à s’en justifier ou du moins sans trop de prérequis, encore plus dans un univers totalement imaginaire, sans en diminuer la qualité intrinsèque, il s’agit de les accepter. Dans le cas d’Ambition, beaucoup de choses étaient laissées en suspens, sans réelles explications autres que l’existence même de ces choses, et ce n’était pas un souci, puisque le compte se trouvait dans les arcs narratifs des personnages et les intrigues dans lesquelles ils étaient impliqués. Or, dans Compassion, Yoann Dubos commence à esquisser de grands lignes explicatives à beaucoup des éléments qu’il a crées, avec une certaine rigueur scientifique, dont la vulgarisation est un plaisir supplémentaire, car particulièrement réussi, et surtout avec un énorme effort de cohérence avec la globalité de ce qui nous est présenté. Ce qui dénote juste assez du premier tome pour être remarquable, mais suffisamment peu pour éviter un dépaysement dommageable, l’équilibre est donc assez admirable. En plongeant ainsi plus en profondeur dans les mécaniques de son monde, en nous en exposant une partie de sa cosmogonie, comme de son évolution en cours, l’ensemble, personnages comme univers, gagne énormément en épaisseur, à partir d’une base pourtant déjà solide, et surtout, oserais-je dire, en maturité ; sans pour autant taxer le premier tome d’une quelconque naïveté. Justement, j’en profiterais pour saluer un rappel assez brillant au prologue d’Ambition qui m’avait déjà tant fait rire à ma première lecture, avec une explication qui ne manque pas de piquant. Il s’agirait plutôt, finalement, de faire grandir l’oeuvre en même temps que son lectorat, ou du moins en même temps que ses personnages, qui gagnent tous en complexité, et n’en deviennent que plus attachants, surtout Miranda Clay, à jamais dans mon cœur. Tout cela rend le roman encore meilleur car il joue encore plus sur nos attentes en ajoutant de nouveaux niveaux de lecture à ceux déjà présents, et nous enjoint à rester sur nos gardes tout le long de la lecture.

Mes souvenirs déjà très enthousiastes du premier volume, et donc potentiellement idéalisés, ou du moins un peu dans le brouillard ont sans doute joué un peu ; mais le fait est que j’ai trouvé ce volume bien plus sombre et violent que le premier, même si je n’ignore pas que ce dernier n’était pas non plus à réserver aux yeux les plus innocents, loin de là. Mais il me semble bien que Yoann Dubos a fait passer un cap à la noirceur de son monde et des personnages qui l’habitent, avec bon nombre de scènes graphiques et/ou crues, qui sans être gratuites, sont tout de même choquantes, à l’aune de l’ambiance générale des romans jusque là. Mais qu’il n’y ait pas méprise, ces chocs sont bénéfiques, d’un point de vue littéraire. Tout simplement parce qu’ils ancrent le récit dans la réalité de son monde et en font tomber le voile faussement positif qu’on avait pu déjà deviner dans le premier tome, sans avoir toutes les clés de compréhension en main. Alors que les personnages, Miranda Clay en tête, en découvrent plus sur les coulisses de cet univers dont ils ignoraient jusque là l’essentiel, nous, lecteurices, en découvrons également de plus en plus, et, au fur et à mesure que le voile se déchire, nécessairement, la noirceur se dévoile. Le plaisir de lecture est donc double ; les inventions conceptuelles s’enchaînent, entraînant les scènes que j’évoquais, drôles, surprenantes ou émouvantes selon les événements décrits, et on ressent l’auteur derrière le texte, jouant des perspectives et des idées, marionnettiste en total contrôle de son oeuvre.

Compassion est une sacrement bonne suite, qui a su répondre avec brio avec bon nombre des questions posées dans le tome précédent, tout en renouvelant une partie des enjeux, sans jamais perdre en clarté ni en rythme, au milieu de jeux de pouvoir d’une belle complexité. C’est riche à bien des égards, c’est fun, divertissant, et ça prend aussi la peine d’être diablement malin par moments, avec une mention spéciale pour les dialogues qui m’ont particulièrement séduit. Autant dire que la pression pour le troisième tome et la conclusion de la saga Ciel Sans Étoiles va être sacrément élevée de mon côté, tant il y aura de choses à y attendre et à y découvrir avec surprise, mais surtout délectation. Mais franchement, avec le niveau atteint dans ce second tome, ma confiance est quasi-totale.

Au plaisir de vous revoir.
En attendant, que votre avenir soit rempli d’étoiles. 😉

1 comments on “Ciel sans Étoiles T2 – Compassion, Yoann Dubos

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