
Abandon à la page 134/280 (Édition Le Livre de Poche)
Commençons par dire avec emphase que j’aime profondément le label Mu des éditions Mnémos, anciennement éditions Mu. Entre certains ouvrages de Michael Roch dont j’ai déjà eu l’occasion de dire beaucoup de bien, ou l’inénarrable merveille des Oiseaux du Temps, je sais qu’avec Mu, j’aurais forcément le droit à une expérience littéraire. Voilà pourquoi je me suis saisi avec confiance et enthousiasme de ce Walter Kurtz était à pied quand il a croisé mon chemin, déjà ravi de pouvoir en dire tout le bien que j’en pensais une fois terminé.
Or, ce n’est pas arrivé, et je ne le terminerai pas. Et normalement, si vous me connaissez un tout petit peu, vous savez que je déteste ne pas aller au bout d’un ouvrage. Mais comme à chaque fois que je résigne à un abandon, c’est plus par souci de préservation que par hostilité envers l’œuvre que j’ai entre les mains. Parce que je sais que quand l’ennui est trop fort, il me ralentit et m’empêche de me concentrer sur ce que je lis ; je prends trop de temps à finir, pour ensuite mobiliser encore plus de temps à dénouer les fils de ma frustration. personne n’y gagne vraiment au final, et surtout pas les bouquins qui devraient venir après. D’autant plus que ces derniers pourraient souffrir de l’ombre néfaste de leur prédécesseur.
Comme toujours, il s’agit de savoir dire stop, reculer un peu pour mieux sauter.
Et comme toujours, je vais essayer de vous expliquer pourquoi ce roman n’était juste pas pour moi.
Et, puisque je me suis arrêté un tout petit peu avant la moitié, forcément, je vais commencer par le commencement. Et pour une fois, je dois dire que mes doutes ont commencé très tôt ; trop tôt, sans doute, pour que le roman d’Emmanuel Brault ait réellement une chance avec moi, collectionnant les mauvais points dans mon barème personnel. D’abord, il y a un argument science-fictif plus symbolique qu’autre chose et semblant assez terriblement manquer de fondations logiques pour moi qui m’a très vite mis mal à l’aise dans ma lecture. Si la métaphore fait sens et crée au passage quelques sympathiques concepts, elle n’en exploite qu’une part trop superficielle pour parvenir à donner à ce monde des Roues suffisamment de chair à mes yeux. Son héros et ses personnages manquent de souffle et s’inscrivent trop dans des archétypes vus et revus, conférant à l’ensemble un sentiment de déjà-lu à mes yeux, et un sacré manque d’audace. Alors certes, je ne suis pas allé au bout, donc je peux absolument me tromper quant à une éventuelle finalité qui m’est inconnue. Mais quand arrivé à la moitié aucun événement du récit n’a su me surprendre ou me plaire un tant soit peu, tant dans l’intrigue que dans la façon de la raconter, avec un terrible manque de suite dans les idées, je me dis que la conclusion du récit n’aurait sans doute pas plus réussi à me séduire, et que la faute ne peut pas entièrement m’incomber.
De fait, *mini-spoil*, le fait que le personnage qui donne censément son titre à ce roman ne soit pas encore apparu ou simplement évoqué alors que j’en ai lu la moitié, ça m’a agacé, et m’a donné à penser que ce roman souffre sans doute d’une terrible problème de cadrage, commençant trop tôt et ne nous donnant pas assez d’éléments de contexte, global comme singulier, pour réellement comprendre ses enjeux. Tout voir de façon purement chronologique au travers des yeux d’un héros médiocre et sa famille lambda dans un monde dont on doit deviner plus que comprendre, sans origines concrètes à prendre en considération, ce n’est vraiment pas ma came. Puisque dès lors, on ne peut pas vraiment se faire une quelconque opinion sur les pensées qu’on nous livre, sur les mœurs qui les motivent, et la moindre envolée lyrico-psychologique se teinte d’une incompréhension insupportable. Je ne peux pas nier que ce roman sache construire et diffuser certaines ambiances et émotions bien réelles, mais ces dernières manquent d’une base sur laquelle s’appuyer pour devenir réellement évocatrices ; ou transcender les lieux communs dans lesquels j’ai cru les voir tomber.
Pour être tout à fait honnête, j’aurais certains autre arguments à ajouter pour justifier mon déplaisir, notamment en pensant à la scène qui m’a décidé à arrêter les frais. Mais ils flirtent trop volontiers avec certains griefs très/trop personnels qui me feraient volontiers verser dans une forme de méchanceté gratuite à laquelle je me refuse. Autant parce que ce roman ne les mérite clairement pas, que par principe. Ma « fonction »(avec de gros guillemets) de chroniqueur ne m’autorise certainement pas à être cruel pour justifier d’une quelconque hauteur de vue à laquelle je ne m’estime pas être. Que j’ai décidé de ne pas aller au bout de ce roman ne lui retire en rien de ses réelles qualités, qui ne sont juste pas celles que je recherche dans mes lectures, furent-elles stylistiques ou émotionnelles. Dès lors, je l’irai pas plus loin.
Mais si nous avons des goûts en commun s’agissant de SF, je ne vous conseillerais probablement pas cette lecture.
Demeure que j’aime beaucoup Mu quand même, et que ça ne m’empêchera certainement pas de me pencher sur le reste de leur production à l’avenir.
Au plaisir de vous recroiser.
En attendant, que votre avenir soit rempli d’étoiles. 😉
Oh tiens, je l’ai celui-là XD
J’le tenterai quand même (un jour)
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Tu me diras à l’occasion.
Je crois que dans un autre contexte j’aurais eu un peu plus de courage.
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