search instagram arrow-down

Si vous ne me suivez par sur les réseaux sociaux, où je suis le plus actif, vous pouvez être prévenu.e par mail à chaque article.

Rejoignez les 117 autres abonnés

Infos Utiles

Mes réseaux

Archives

Dragons et Mécanismes, Adrien Tomas

Cards Are Down – The Blue Stones (extrait de l’album Pretty Monster)

Ça fait un petit bout de temps que j’avais envie de lire ce bouquin, ne m’arrêtant bêtement à chaque fois qu’à cause d’une retenue rythmique : il ne s’agirait pas non plus de reboucler sur les mêmes auteurices encore et encore, pour toujours en dire le même bien un peu béat. Varier les plaisirs et les commentaires, en somme. Et puis à force de subir des lectures compliquées à traverser comme à chroniquer, je me suis dit que cette discipline auto-infligée était peut-être un peu couillonne et contre-productive, en fin de compte, quand même. À croire que je n’apprends jamais vraiment ; ou alors il faut m’expliquer longtemps.
Donc bref, j’ai encore lu du Adrien Tomas, parce que j’ai confiance en son travail, et que le lire me fait du bien. Dragons et Mécanismes, incidemment, confirme encore ce que je savais déjà : j’aime beaucoup la production de cet auteur, et j’ai bien fait d’écouter mes envies, une fois de plus.

Dague est un jeune voleur plein d’avenir qui subsiste tant bien que mal dans le quartier malfamé des Gorgones, sur l’île de Xamorée, territoire hostile où l’homme cohabite tant bien que mal avec la menace permanente des dragons venus du cœur des terres. Mira, elle, est la future archiduchesse d’Asthénocle, en exil, tentant de fuir l’infâme Arlov, responsable du coup d’état qui a coûté la vie à ses deux parents, lancé à sa poursuite pour s’accaparer son génie et le prestige de son titre par un mariage forcé. Par le hasard d’une mission de surveillance du port où débarque Mira, Dague sauve la jeune fille d’une attaque de l’usurpateur et lie son destin au sien.

Alors, comme j’ai déjà pu le dire auparavant, que ce soit à l’occasion de mes chroniques sur Engrenages et Sortilèges ou Vaisseau d’Arcane – dont je vais sans doute malgré moi recycler pas mal de remarques – Adrien Tomas ne prétend probablement pas réinventer la poudre avec ses histoires ; du moins pas d’un point de vue narratif ou dramaturgique. Ce qui n’est absolument pas matière à reproche de mon point de vue, encore une fois ; d’autant plus en considérant, particulièrement ici, que je ne suis absolument pas le public cible. Il n’est question, je crois, que de raconter une histoire aussi efficacement et organiquement que possible, quitte à sacrifier – pour un public un peu trop habitué à l’exercice – à l’effet de surprise ou à la subtilité. Ce que je veux dire par là, c’est que pour une expérience telle que la mienne, il est compliqué de se faire avoir par les tropes mobilisés par l’auteur dans ce roman : j’ai vu beaucoup de choses venir. Mais je m’en fiche absolument, parce que le cœur du récit, ce sur quoi Adrien Tomas m’a semblé mettre l’accent, n’en est pas demeuré moins sincère : au contraire.

Ce que je veux dire par-là, c’est que malgré un soin évident apporté à une intrigue solide et filant droit de bout en bout, avec un rythme impeccable, il m’a semblé que les ambitions de l’auteur, dans ce roman, visaient en priorité d’autres intentions : et c’est que ce j’aime particulièrement chez lui. Parce qu’au delà de livrer une histoire efficace, Adrien Tomas parvient quand même, encore une fois à se laisser de la place et du temps pour des réflexions annexes qui n’en sont pas vraiment. J’ai cité Engrenages et Sortilèges et Vaisseau d’Arcane parce que ces romans partagent évidemment plus que des similitudes techniques ou génériques, mais un univers et des réflexions. À l’instar des travaux littéraires d’un Lionel Davoust ou d’une Rozenn Illiano (oui, je sais), il s’agit de construire un monde partagé, des références communes, des ponts thématiques et des clins d’œil d’un ouvrage à l’autre, tout en conservant leurs indépendances. Et non seulement j’adore ça d’un point de vue purement créatif, mais j’adore encore plus ça d’un point de vue conceptuel ; d’un roman à l’autre, leurs perspectives s’enrichissent mutuellement sans jamais rien se retirer ni soustraire à leurs qualités propres.
On se retrouve, si on a lu les autres romans, à comprendre certaines précisions et remarques des personnages ou de la narration sur deux ou trois niveaux ; ce qu’on comprend d’un système politique selon qu’on ait de la distance ou qu’on y soit impliqué localement, par exemple. Et j’adore ça, oui, la richesse de cet univers créé par Adrien Tomas, allant au delà des « simples » concepts de fantasy ou des différents systèmes de magie ; alors que vraiment, si vous me connaissez, vous savez les systèmes de magie c’est mon truc, hein. Mais mobiliser à ce point-là la fantasy pour confronter des conceptions politiques, des possibilités si étrangères, si exotiques, qu’elles viennent toucher notre réalité par l’autre bout, d’autant plus au sein de flux de pensées et d’aventures organiques et conscientes, je trouve ça formidable.

Parce que c’est ça aussi, qui est bon, chez Adrien Tomas. À me lire, là, vous pourriez vous dire que de la littérature jeunesse articulée autour de concepts politiques et de réflexions techniques dans un contexte de fantasy ça semble un brin barbant : sauf que non, évidemment. Parce qu’une fois encore, l’une des forces de cet auteur, c’est de maîtriser l’intrication de ces sujets avec les trajectoires de personnages riches et complexes, malgré ce que le genre pourrait laisser préjuger de clichés et de poncifs. Déjà, ce que je salue à chacune de mes lectures de cet auteur, c’est la luminosité de sa grisaille. En dehors de quelques personnages spécifiquement créés dans l’optique d’être détestables, personne n’est unidimensionnel ; même nos protagonistes – surtout iels, d’ailleurs – ont leur défauts, légères parts d’ombre sur lesquelles il leur faut travailler, communiquer, partager, afin de devenir de meilleures personnes, et, incidemment, personnages.
Et c’est là que se niche toute mon appréciation enthousiaste du travail d’Adrien Tomas : l’infinité de détails qu’il inclue dans ses récits, sans forcer. Au contraire, il parvient, par le jeu des points de vue et des situations, à infléchir des considérations qui pourraient apparaître tertiaires ou superflues pour leur donner l’importance qu’elles méritent réellement dans le fil de son récit. Ainsi, on a le droit à tout un tas de petites choses qui ne sont sans doute pas si petites que ça qui s’incrémentent tout le long du roman et verbalisent des choses importantes ou donnent du grain à moudre à qui voudra bien prêter quelques secondes ou minutes pour y réfléchir. Je parle là évidemment des questions politiques que j’abordais plus tôt, mais aussi des sujets touchant à l’inclusivité, qui me paraissent aujourd’hui vitaux à introduire dans nos récits pour qu’un jour, justement ils ne soient même plus des sujets.

Bref, rien de nouveau sous le soleil : j’aime beaucoup le travail d’Adrien Tomas, et je suis content de m’être écouté.
Que dire de plus ? Rien, je crois. J’ai beau ne pas vraiment être le public cible, j’ai quand même pris beaucoup de plaisir à ma lecture, et j’espère de tout cœur que des gens dans ce public cible en auront pris encore plus et continueront à le faire à l’avenir.
Quant à moi, je guette ce qui me reste à lire de cet auteur formidable, comme les futures sorties. Bon deal.

Au plaisir de vous recroiser.
En attendant, que votre avenir soit rempli d’étoiles. 😉

1 comments on “Dragons et Mécanismes, Adrien Tomas

  1. Idem, je ne suis pas le public cible et pourtant ce roman m’a bien plu ! J’ai l’impression, du peu que j’ai lu de cet auteur (« Notre-Dame des loups », « Les dossiers du Voile » et, bien sûr, « Dragons et mécanismes »), il est une valeur sûre.

    Aimé par 1 personne

Laisser un commentaire
Your email address will not be published. Required fields are marked *