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Engrenages et Sortilèges, Adrien Tomas

Love Again – Dua Lipa (extrait de l’album Future Nostalgia)
Voices – Against The Current (extrait de l’album Past Lives)

Des fois, quand même, il faut savoir saluer quand les choses se goupillent bien, malgré des circonstances pouvant laisser penser le contraire. J’ai croisé Adrien Tomas pour la première fois lors aux Imaginales, où il parlait d’Engrenages et Sortilèges, dans le cadre d’une table ronde sur le thème des sorciers dans la littérature après Harry Potter. J’avais été séduit par les idées présentées, et je m’étais dit qu’il fallait que je retienne le nom. Aléas des priorités parfois compliquées à gérer, je confesse que je ne m’y suis pas attaqué aussi tôt que je l’aurais voulu. Et puis, gros consommateur de Twitter que je suis, j’ai commencé à beaucoup croiser Adrien Tomas, pour certaines de ses sorties et dans quelques conversations très intéressantes. Comme d’autres auteurs, ses positions et sa personnalité m’ont laissé penser que ses romans devaient être aussi plaisants que lui. Alors ses œuvres sont encore remontées de quelques crans dans mes priorités. Je me promis de passer le cap aux Imaginales de cette année. Et puis le confinement, l’annulation du festival, la frustration et la tristesse. Mais voilà que Rageot se décide, comme bon nombre d’éditeurs fort généreux, à mettre à disposition certains de leurs romans, gratuitement, en numérique. L’occasion était trop belle, je me jetai donc avidement sur la copie d’Engrenages et Sortilèges, avec la ferme intention d’en faire mon après-midi.
Verdict ?

Au sein de la prestigieuse Académie des Sciences Occultes et Mécaniques, on ne peut pas dire que Cyrus et Grise, respectivement mage et mécanicienne, se portent chacun dans leurs cœurs. Au contraire, leurs caractères, autant que leurs domaines d’expertises, traditionnellement opposés, auraient tendance à en faire des ennemis jurés. Mais quand le hasard les pousse à devoir échapper ensemble à une tentative d’enlèvement au sein même de leur école, tout change. Ils devront donc s’échapper ensemble, et travailler de concert afin de comprendre la teneur exacte de la menace, pour l’affronter au mieux.

J’ai déjà eu l’occasion ici de revenir en substance sur l’évolution de mon ressenti à propos de la littérature jeunesse, notamment en parlant d’Ambition ou Dans l’Ombre de Paris. Autant commencer par l’évidence, Engrenages et Sortilèges ne fait certainement pas exception, et aurait même tendance à confirmer la tendance positive. J’y ai en effet retrouvé les mêmes qualités de malice, d’efficacité, de rythme et de réflexion. Mention spéciale, encore une fois, aux personnages, dont les évolutions et dialogues sont un plaisir de découverte sans fin. Et personne n’est laissé en reste, puisqu’au delà de Cyrus et Grise, dont les trajectoires d’évolution sont assez captivantes, les personnages secondaires ne sont certainement pas en reste. Tout le monde a droit à ses petits moments de gloire, avec un bon mot, une belle réflexion, une belle émotion, ou simplement une belle histoire à partager, sans jamais verser dans la naïveté, le pathos dégoulinant ou un manichéisme agaçant. Au contraire, personne n’est unidimensionnel, loin de là, y compris du côté des antagonistes, chacun se laissant parfois aller à ses travers, mais jamais sans raison ; laissant presque toujours la porte ouverte à des occasions de rédemption ou de changement positif.

À cet égard, j’ai énormément apprécié les changements de point de vue à chaque chapitre, qui, bien qu’étant toujours écrits à la troisième personne, laissent la place aux visions particulières des personnages concernés ; variant donc les intérêts et faisant avancer certaines sous-intrigues par petites touches discrètes, semant quelques indices au passage, selon ce que chacun pense ou remarque. Et si j’ai bien senti venir une partie des révélations et développements de l’intrigue, notamment une surprise bien précise, très tôt, je n’ai à aucun moment boudé mon plaisir, au contraire. Grâce, je crois, au-delà des personnages principaux si attachants, à un propos social et politique extrêmement percutant, qui m’a fait beaucoup de bien. D’abord en lui-même, mais aussi pour sa rareté, il me semble, en tout cas sous cette forme, reposant sur la nécessité impérieuse de voir les choses depuis un autre point de vue que le sien propre. Un discours intelligent donc, mais surtout nuancé, dépendant d’un contexte, de personnages et d’un univers riches. Notamment à travers son système de magie assez original, aux implications multiples, laissant beaucoup de place à l’imagination.

Et arrivé là, il me faut évoquer le chapitre 26, sans trop en dire, certes, mais j’y tenais. Quel petit bijou ; un petit aparté dans l’histoire du roman qui n’en est pas vraiment un, décidant soudain de changer de perspective. En quelques pages, Adrien Tomas nous en fait découvrir énormément, à la fois sur son univers, mais aussi sur le contexte exact de son histoire au sein de cet univers, et c’est probablement le meilleur souvenir que je garderais de ce roman. Parce qu’il y déploie tout son talent pour la concision et l’évocation, se concentrant sur énormément de détails à la fois dans un espace textuel relativement restreint : parvenant pourtant à les faire s’étendre au maximum de leur capacité, allant presque au delà des limites qui semblaient établies. Un chapitre entier qui sert d’inspiration avant la course qui sert à conclure le roman, en beauté. Un magnifique moment de lecture.

Un moment qui est d’ailleurs à mettre lui même en perspective avec un autre aspect important du roman pour moi, qui est son choix, au delà du propos politique et social, de ne pas faire l’impasse sur la nécessité des luttes, mais aussi sur les origines et surtout conséquences de ces dernières. Car si j’ai pris un plaisir sans borne à lire les quelques piques et saillies des divers personnages, leur humour face à des situations graves, j’ai également pris un grand plaisir, plus adulte celui-là, à lire que les choix les plus déterminants que les gens ont à faire ont des répercussions parfois très difficiles à vivre. Il faut bien admettre que dans le contexte actuel, ces considérations font sens, montrant une fois de plus que l’Imaginaire, y compris en jeunesse, sait parler de sujets compliqués avec une vraie force de percussion, sans pour autant sacrifier aux nuances.

Tout ça pour dire qu’encore une fois mon instinct a fait mouche. Engrenages et Sortilèges a été un grand kiff de lecture, dévoré en une après-midi, sans le moindre soupçon d’ennui, laissant cohabiter en moi tous les âges qu’il me reste, chacun prenant sa part de plaisir là où il pouvait le prendre, sans regret. J’y ai trouvé du grain spirituel à moudre, quelques bons souvenirs avec lesquels sourire et des idées pour plus tard ; que du bon. Ma seule frustration sera finalement de ne pas pouvoir tant que ça rentrer dans le détail, toujours pour préserver le maximum de surprises, pour celles et ceux qui se laisseraient tenter.
Maintenant, encore une fois, il ne me reste plus qu’à promettre que la prochaine sera payante et que je vais pouvoir tenir ma promesse. Ma dette karmique commence à salement se charger, mais je ne m’en plains pas, au contraire. Trop de belles occasions de découvrir à quel point mon instinct est doué. À charge de revanche donc.

Au plaisir de vous recroiser.
En attendant, que votre avenir soit rempli d’étoiles. 😉

5 comments on “Engrenages et Sortilèges, Adrien Tomas

  1. La critique est superbe, comme toujours, mais elle ne vaudrait le coup même s’il est n’était composée que de ce « laissant cohabiter en moi tous les âges qu’il me reste ».
    Je suis refait.

    Aimé par 1 personne

    1. lairdfumble dit :

      Ben merde alors, merci beaucoup ! 😀

      J’aime

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