search instagram arrow-down

Si vous ne me suivez par sur les réseaux sociaux, où je suis le plus actif, vous pouvez être prévenu.e par mail à chaque article.

Rejoignez les 117 autres abonnés

Infos Utiles

Mes réseaux

Archives

Les Chroniques du Grimnoir T1 – Magie Brute, Larry Correia

jump – Againt The Current (extrait de l’album fever)
The Ballad of Smokin’ Joe Rudeboy – Tom Cardy (extrait de l’album Big Dumb Idiot)

Comme je le disais il y a très peu de temps, je ne crois pas tant au signes qu’aux heureux hasards significatifs (). Mais alors que je me prenais un peu la tête en parallèle de ma lecture du jour pour savoir quelle chanson j’allais bien pouvoir associer à la chronique qui nous concerne maintenant, il aura suffi que ma playlist Good Spirit me balance celle qui lui a finalement échu au moment même où je me suis lancé pour l’écrire. Pour être complétée plus tard par une autre, y ajoutant la bonne dose d’ironie. Je vous jure qu’à mes yeux, tout fait sens. Vraiment.
Pardonnez moi. On a les introductions qu’on peut.
Le fait est que ces choix de chansons et ces associations, c’est vraiment un truc que je fais pour moi avant tout. Je ne me fais pas d’illusions ; après plusieurs centaines de chroniques, c’est pas comme si j’avais déchainé les foules ou les conversations autour de cette petite lubie toute personnelle. Mais au delà de mon addiction à la musique me semblant aller de paire avec mon rapport vorace à la lecture, si je fais ce travail d’appairage, c’est parce que j’aime bien l’idée que tous les bouquins sont absolument uniques, comme les morceaux que je leur associe. En dépit de toutes les similitudes stylistiques ou conceptuelles que je pourrais y trouver au fil de mes découvertes et redécouvertes, j’apprécie l’idée de pouvoir chercher et trouver des liens intimes entre la musique que j’écoute et que j’aime et les bouquins que je chronique ici.
Et – puisque tout ça va quelque part, promis – j’ai été tenté, pendant toute une partie de ma lecture, et donc de ma réflexion préparatoire pour cette chronique, de, pour la première fois, me répéter dans mon choix musical. Parce que je trouvais que dans la démarche de Larry Correia, je retrouvais beaucoup de celle – me semble-t-il – choisie par Robert Jackson Bennett dans ses Maîtres Enlumineurs. Sauf qu’au fil de ma lecture, et c’est ce que je vais expliquer ici, évidemment, des différences notables se sont faites jour à mes yeux. Et c’est pourquoi j’ai bien kiffé ce Magie Brute, me donnant envie de lire la suite, contrairement à l’exemple susnommé.
Procédons.

États-Unis, années 30 : la société est depuis des années bouleversée par l’apparition subite des actifs et de la magie dans la population, rebattant les cartes à l’échelle du globe. Nous y suivons Jake Sullivan, vétéran de la Grande Guerre et repris de justice capable de manipuler la gravité, obligé de bosser pour le FBI afin de payer sa dette à la société. Lors d’une opération qui tourne très mal, il découvre qu’une guerre occulte fait rage, l’obligeant à prendre position dans ce conflit qu’il voudrait ne pas voir le concerner. Mais ses connaissances et sa puissance hors du commun ne lui laissent pas le choix, à l’instar de la jeune Faye, active capable de se téléporter, dont le grand-père adoptif est tué sous ses yeux, car il détenait une pièce d’une machine terrible motivant les deux camps. Carambolage des destins et des pouvoirs.

L’uchronie, c’est ma came. Les systèmes de magie poussés, c’est ma came. Les personnages complexes, les relations interpersonnelles, c’est ma came. Magie Brute : c’est ma came. Voilà. Disons le clairement, en dépit des quelques reproches à faire à ce roman, sur lesquels je reviendrai évidemment dans la suite de cette chronique, j’ai pris mon pied pendant toute ma lecture. Ce premier tome est, avant toute autre chose, efficace. Sacrément efficace, même. Alors oui, ça compose avec un sacré paquet d’archétypes et de tropes ultra-communs, mais bon dieu que ça le fait bien ; parce que Larry Correia en joue autant qu’il en est volontairement victime. Le gros dur avec un cœur d’or, la jeune bouseuse (sic) ultra talentueuse, les méchants très méchants avec des motivations compréhensibles mais cassés par leurs angoisses et ressentiments (syndrome Magnéto, rpz Bolchegeek), j’en passe : quand c’est bien fait et qu’on prend quelques détours faisant office de clins d’œil et d’une claire compréhension de ce qui est en jeu, ça marche, et puis c’est tout.
Et du coup, bah Larry Correia, à mes yeux, il a compris le jeu. Comme je le disais, pendant un petit tiers, mon ressenti était exactement le même que pour Les Maîtres Enlumineurs ; la comparaison me parait vraiment inévitable, d’autant plus qu’elle est très fraiche dans ma mémoire. J’avais cette même impression d’un peu trop savoir où tout ça allait, compensée par une distribution plus convaincante, quoique peut-être un peu trop foisonnante. Mais au moins, j’étais un minimum pris par les dynamiques interpersonnelles assez fouillées et crédibles et la curiosité de voir le système de magie se mettre discrètement en place.

Il aura fallu dépasser ce premier tiers et une première grosse surprise pour me dire que « là, ok, je suis dedans ». Une première grosse subversion des enjeux, une façon pour l’auteur, je crois, de dire clairement qu’on allait pas non plus y passer cent-vingt-cinq mille ans, et que certains aspects de son univers n’étaient pas là pour être des mystères : cette frontalité, cette honnêteté, j’avoue que je trouve ça extrêmement rafraichissant, en plus d’être assez malin, en vrai. Larry Correia, de cette manière, nous dit clairement que ses questionnements comme les réponses qu’il compte y apporter ne s’inscrivent pas dans cet aspect de son roman, et que ses ambitions se situent ailleurs. Et je dis oui : tout n’a pas besoin d’être l’enjeu central. Certaines choses, littérairement parlant, peuvent n’exister qu’en soutien à l’histoire et à ce qu’on veut raconter. Écrire c’est choisir, tant que les choix sont clairs et cohérents, je sais être réceptif, faire fi de certaines de mes curiosités rendues nulles et non avenues.
Ici, l’auteur voulait raconter une histoire conceptuellement simple, réduite à ses plus simples expressions, ne grisant que très légèrement les lignes dans une opposition frontale et manichéenne. Et bien qu’appréciant intimement l’idée que la vie, les gens et tout le reste, c’est compliqué ; si on me présente un récit d’action sévèrement burné en annonçant clairement la couleur dès le départ, je suis prêt à le recevoir tel quel sans trop de jugements négatifs. Les bouquins, c’est pas vraiment la vie, surtout quand on parle d’uchronie : il est assez facile de faire abstraction de choses qui ne jurent pas trop avec mes valeurs quand elles ne constituent pas le cœur du propos. Surtout quand les événements en question se déroulent dans les années trente dans un contexte exceptionnel à plus d’un titre. En gros, ça passe.

C’est là qu’on en vient nécessairement avec ce qui m’a parfois un peu fait tiquer, quand même, au fil de ma lecture. Tenant en somme à une expression toute simple mais assez évocatrice : ‘MURRICA, FUCK YEAH !
C’est bourrin. Y a du gun porn, et tout ne peut se régler qu’à coup de baston, préférablement jusqu’à la mort. Les américains, c’est les gentils, ils ont le meilleur pays du monde, et les étrangers c’est basiquement que des barbares à qui il faut tout expliquer ; quitte à s’abimer les phalanges et les épaules au passage dessus, pour les plus réfractaires à la DÉMOCRATIE. Alors forcément, ayant été à moitié biberonné à la culture yankee depuis ma plus tendre enfance, j’ai développé une forme de tolérance. Une sorte de mithridatisation étoilée : je peux prendre du recul dessus et me dire que si j’étais directement concerné par ce qui est dépeint dans le bouquin, je serais du mauvais côté de son spectre manichéen, mais ça ne m’empêche pas de kiffer de bonnes scènes d’action bien écrites et inventives, tout comme des personnages bien construits et quand même assez attachants, à leur manière.
Parce que ça file droit, tout ça, franchement. Dans ce genre de cas, on parle de page-turner, je crois. Les infos sont bien distillées, les changements de point de vue réguliers comme les multiples clins d’œil à notre histoire ou notre culture donnent à voir les choses sous plein d’angles différents, nous nourrissant subtilement d’éléments complémentaires, que ce soit à l’échelle de l’intrigue ou à l’échelle du world-building. Et surtout nos attentes sont suffisamment régulièrement déçues et/ou agréablement subverties pour qu’on ait envie de savoir le fin mot de cette damnée histoire. Les ponctuelles confusions dans le fil de la narration et quelques transitions nébuleuses, à cet égard, n’ont qu’un impact minimes, même s’il faut noter leur présence, par honnêteté : c’est le prix à payer pour un rythme aussi soutenu, sans doute, autant que pour un univers qui a grave de la gueule.

Tout ça fait qu’au final, j’ai envie de lire la suite, parce que malgré les qualités d’indépendance de ce premier tome, tout comme ses quelques errements un peu trop américanisés timidement contenus, je sens que Larry Correia en a encore beaucoup sous le pied. Il y a là du potentiel pour de l’action, certes un peu décérébrée, mais néanmoins maline dans son exécution, tout comme on peut deviner une myriades de possibilités conceptuelles pouvant mener l’ensemble plus loin : j’ai envie de voir comment cet univers peut être exploité plus avant.
Nous verrons donc quand l’occasion se présentera.
[Après une rapide discussion sur Twitter avec des gens que j’estime, il apparaitrait que l’auteur n’est pas le plus recommandable au vu de mes valeurs et principes, me rendant après coup nettement plus frileux. Mon jugement sur ce volume en particulier en demeure essentiellement inchangé, mais je me réserve beaucoup plus prudemment pour l’éventuelle suite à donner à la découverte du reste des Chroniques du Grimnoir, comme le reste du travail de Larry Correia.
Tellement de choses à lire, si peu de temps, parfois, mêmes des raisons pouvant sembler un brin mesquines justifient de tirer des traits plus ou moins définitifs afin de s’économiser en énergie et en atermoiements. C’est un positionnement personnel, pas un étendard derrière lequel j’appellerais qui que ce soit à se ranger. Je précise au cas où.]

Au plaisir de vous recroiser.
En attendant, que votre avenir soit rempli d’étoiles. 😉

Laisser un commentaire
Your email address will not be published. Required fields are marked *