search instagram arrow-down

Si vous ne me suivez par sur les réseaux sociaux, où je suis le plus actif, vous pouvez être prévenu.e par mail à chaque article.

Rejoignez les 117 autres abonnés

Infos Utiles

Mes réseaux

Archives

U-H-L #50 – De l’espace et du temps, Alastair Reynolds

Sounds of Yesterday – Poets of the Fall (extrait de l’album Ghostlight)

Ce qui est très bien avec Le Bélial’ en plus de leur continuelle générosité – merci pour le SP, encore une fois – c’est qu’ils ont de la suite dans les idées. C’est cool de pouvoir faire vivre sa propre curiosité au travers de leur propre fidélité aux auteurices qu’ils aiment et publient. Depuis Éversion et La Millième Nuit, je suis toujours en quête de plus de textes d’Alastair Reynolds, afin de creuser son imaginaire fascinant et sa maîtrise littéraire. Lier l’utile à l’agréable, en somme.
Ce qui est dommage ici, et même très dommage, c’est que ce troisième essai est à mes yeux un échec, le symptôme d’une certaine obsession de l’auteur que je commence à trouver vaguement malsaine, ou en tout cas extrêmement triste ; ce qui est quand même franchement dommage quand à l’issue de ma dernière chronique à son sujet, j’exprimais précisément l’espoir de le lire écrire quelque chose d’un peu plus joyeux ou optimiste.

Dès le départ, je dois bien dire que j’ai tiré la tronche. No spoil, ça commence par de l’agonie contemplative et ça ne va que moyennement en s’arrangeant. Alors certes, les adeptes d’un certain sense of wonder pourront sans doute y trouver leur compte, Alsatair Reynolds tentant assez frontalement de nous offrir un vertige conceptuel massif et une forme de consolation philosophique. Mais force est de reconnaître que la mélancolie désabusée n’est pas mon émotion favorite en littérature, peu importe avec quoi on essaie de la mettre en contraste. D’autant qu’ici, si le fonds n’est pas ma came mais aurait pu être éventuellement compensée, la forme ne fonctionne absolument pas à mes yeux et plonge l’ensemble dans un marasme assez ennuyeux. Déjà que la fin de l’humanité telle qu’on la connait est une thème qui ne me passionne pas, la mettre en scène comme le fait ici Alastair Reynolds me paraît passablement anthropocentrée et pénible, en dépit de ses efforts pour l’éviter.

Paradoxalement, en voulant probablement s’épargner des longueurs obscures et lourdes afin de resserrer son texte au maximum pour le concentrer sur l’essentiel au travers de son personnage-outil, l’auteur sacrifie beaucoup trop de données essentielles à son bon fonctionnement. J’ai trouvé beaucoup d’ellipses bien trop généreuses et précipitées, rendant ironiquement les passages les plus techniques encore plus propices aux soupirs blasés.
J’ai déjà dit ici et je redirai sans doute très longtemps que je crois très fort au concept de Pan Narrans que l’on doit je crois à Ian Stewart et Jack Cohen pour désigner l’espèce humaine actuelle ; nous sommes de grands singes raconteurs, trouvant notre progrès et notre évolution au travers des histoires que nous nous racontons. Nous avançons collectivement à coup de tâtonnements fictifs plus ou moins imaginatifs afin de trouver des idées et explications satisfaisantes qui nous permettent au fur et à mesure de mieux nous comprendre nous mêmes et appréhender nos possibles futurs.
Et ici, je trouve que ça va simplement trop loin dans l’abstraction pour simplement pouvoir être un minimum concret, ou du moins pouvoir s’identifier de façon satisfaisante. Peut-être est-ce dû à l’idée que je rejette en bloc la soif de connaissance absolue habitant le protagoniste, assimilable à mes yeux à celle d’une immortalité que je considère depuis longtemps comme profondément malsaine et le contraire de souhaitable. Nul doute que ça joue. Autant que faire reposer la moindre chance de survie collective sur une sorte de coup de bol cosmique qu’on ne mériterait probablement pas à l’aune de notre propension à l’auto-destruction.

Peut-être que je n’ai simplement pas aimé ce texte parce qu’à l’instar d’un Sur la Route d’Aldébaran, il pue le désespoir nihiliste, se réfugiant dans une sorte de fantasme futuriste désincarné où persistent malgré tout les mêmes errements, les mêmes erreurs, les mêmes interrogations redondantes. Des textes qui prétendent ou du moins essaient un peu naïvement de sortir de ce que nous sommes pour finalement y retomber systématiquement, à coup de références datées et d’échos de notre modernité nous ramenant toujours à la fange dont ils clament apparemment vouloir sortir. Ça ne fonctionne pas pour moi, parce qu’en dépit de grandes envolées littéraires affichant des ambitions lumineuses qui m’échappent intimement, je n’en vois finalement que la griseur empoissant chaque mot. Ce texte me semble vouloir dire « on va s’en sortir quoiqu’il arrive », mais je n’y lis finalement que « on est déjà foutu ». Et si d’une certaine manière, je partage un peu le constat moi-même, ce qui manque de cohérence mais pas de sel, j’en conviens ; il demeure que je n’ai pas envie de lire ce genre de textes, et je les trouve de toute manière assez ratés, au niveau purement littéraire, puisqu’ils ne parviennent pas à me faire réellement ressentir ce qu’ils veulent me faire ressentir.

Je suis déçu. D’abord parce qu’un UHL qui ne fonctionne pas pour moi est toujours un peu déchirant, mais aussi et surtout parce que je crois qu’Alastair Reynolds et moi ne sommes pas faits pour nous entendre, à ce stade. Je le lirai quand même, quand l’occasion se présentera, et tant que mon souhait d’exhaustivité quand à l’une des collections d’Imaginaire les plus importantes de notre temps perdurera. Simplement, mes espoirs ne seront pas nécessairement pas aussi hauts qu’ils l’ont été. C’est comme ça.

Au plaisir de vous recroiser.
En attendant, que votre avenir soit rempli d’étoiles. 😉

Laisser un commentaire
Your email address will not be published. Required fields are marked *