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L’oeuf du dragon, Robert L. Forward

Teach Me – The HU (extrait de l’album Rumble of Thunder)

Je vais être absolument transparent : j’ai plus accepté ce sp de L’oeuf du dragon mû par un certain esprit de bonne volonté que par confiance, refroidi que j’avais été par ma lecture de Superluminal. J’avais très peur que cette nouvelle publication dans la jeune collection Stellaire de Mnémos me laisse elle aussi sur ma faim ; mais à cheval offert on ne regarde pas les dents, on ne sait jamais, tout ça. Après tout, j’aime beaucoup cette maison d’édition dans ses autres publications, la probabilité que ce coup de malchance ne soit rien d’autre que ça était absolument non nulle.
Et de fait, ladite probabilité m’a explosé à la tronche avec une intensité et une force d’impact rare, et il va falloir que je vous explique ça en détails et avec une sincérité et un enthousiasme que j’espère contagieux·ses. Et à roman exceptionnel, chronique un peu particulière ; on va faire les choses un peu différemment de d’habitude.
Lezzgo.

Pas de résumé, pour commencer, parce que je pense sincèrement que ce roman ne peut pas se synthétiser au travers de son intrigue, mais plutôt au travers de ses ambitions ; au travers de ce qu’il m’a fait ressentir, personnellement. Intimement, même, j’oserais. Alors je vais procéder de façon chronologique, au moins au départ, on verra ensuite où tout ça me mène.

Bon. Ceci étant dit. Pendant 70 pages, j’ai flippé, sans doute échaudé par l’expérience malheureuse préalablement citée. J’ai même ponctuellement soupiré très fort. L’oeuf du dragon commence par de la hard-sf. Et pas du genre qui fait semblant, hein. C’est aride, très technique, y a du male gaze d’entrée de jeu, et j’ai vraiment cru que j’allais avoir droit à un vieux roman de nerd masculin old school où le concept est roi, où on se concentre en vain sur le « quoi », le « comment » et le « pourquoi » en oubliant le « et donc ? » – la partie qu’habituellement je préfère – quitte à oublier de simplement raconter une bonne histoire tournant autour de ce concept.
Et puis la bascule s’est faite, tout doucement. Tranquillement, sans que je la vois vraiment arriver. Robert L. Forward, tout d’un coup, m’a fait comprendre où il voulait en venir. Et j’ai été happé. Conquis. On s’est radicalement éloigné de l’humanité pour s’intéresser aux cheelas, une espèce alien, de très près. Et autant vous dire qu’à partir de là, j’ai cessé de soupirer, pour me mettre à m’exclamer, à me réjouir à haute voix, à faire des pauses dans ma lecture juste pour en dire tout le bien que j’en pensais à ma copine qui lisait son propre bouquin à côté de moi ; sans scrupules aucuns. La fièvre, ça ne se combat pas, ça se transmet.

Alors ouais, de temps en temps, on sentait le joyeux nerd que devait être l’auteur – avec tout le respect que j’ai pour les nerds, hein, j’en suis un petit, dans mon genre – se perdre un peu dans ses explications. Il y a, indubitablement, dans ce roman, des infos-dump technico-technologiques, des tentatives peu brillantes de vulgarisation, oui : des longueurs, donc. Mais bon sang, ce que je peux m’en foutre, en vrai, arrivé à la fin ; tout le reste est tellement merveilleux. Et je pèse ce mot, j’y mets du poids, de la gravitation démultipliée. L’oeuf du dragon, en somme, me donne envie de faire des phrases.
Parce que les cheelas, par l’ampleur de leur trajectoire civilisationnelle, par le rapport que Robert L. Forward établit entre iels et nous, sont une des races aliens, si ce n’est la race alien que j’ai le plus aimé lire de tout mon parcours de lecteur de sf. D’une part, évidente, parce que leur mode d’existence et la complexité de leur simple existence est un délice d’altérité à lire pour qui y trouve son compte, mais d’autre part parce que l’auteur y inscrit en creux un nombre de réflexions vertigineux. Que dire, finalement. J’ai adoré lire une race alien dépouillée d’un maximum d’oripeaux anthropocentrés, chez qui le sexisme n’existe pas, sans que l’auteur n’appuie jamais sur la question mais la laisse subtilement s’imposer à son lectorat, chez qui on peut lire l’invention des mathématiques – spoil mineur, promis – avec une clarté et une simplicité désarmantes, comme tant d’autres choses magnifiques.

Si désarmantes, de fait, que je me retrouve, comme face à d’autres chefs d’œuvre du genre – puisque je pense que c’en est un – un peu démuni. Oui, ce roman a quelques défauts au delà de son introduction discutable, liés à son époque, sans doute, comme aux goûts littérairo-scientifiques un peu trop poussés de son auteur ; mais pour autant, ils ne font simplement pas le poids face à l’intelligence cosmique de leur auteur, et à l’infinité de qualités qu’il lui prête. Au rang desquels, je me répète, la fascinante et exceptionnelle prise de distance avec l’humanité (malgré les qualités discrètes de celle que décrit Robert L. Forward), ne constituant qu’on aspect secondaire de l’Histoire qui nous est contée, se retrouvant jusque dans la façon de raconter certaines choses avec un vocabulaire nouveau ; tout comme dans la délicate bienveillance qui enrobe l’ensemble du récit, sans pour autant faire l’impasse sur les réalités parfois brutales qui composent nécessairement l’existence. Une myriade de détails habitent ce récit, lui conférant une profondeur absolument captivante, jouant autant sur l’ironie dramatique que sur les joyeux hasards de nos vies, mais à une échelle complètement inédite. Et tout ça sans jamais se la jouer ou se la raconter avec des effets de style malvenus ou un cruel manque de subtilité qui n’aurait eu d’autre volonté de la part de l’auteur de montrer à quel point il est vraiment trop fort. Alors que pourtant, avec ce récit, pour moi, Robert L. Forward a vraiment été très très fort.

Au point que je me demande, comme parfois, pourquoi et commence, ce roman n’est pas arrivé entre mes mains plus tôt. Comment ça se fait qu’on m’ait tant parlé de Rama, de La main gauche de la nuit, de Demain les Chiens, ou d’autres encore durant toutes ces années, sans que ce roman particulier ne m’ait jamais été cité ? Ce n’est pas pour diminuer la singularité de ces autres jalons essentiels de la SF, hein, comprenons-nous bien, leurs mérites sont évidemment indiscutables, mais je ne peux que me poser la question. Et puis finalement l’écarter d’un revers de main indolent : on s’en fout, maintenant, il est là – ou de retour, si vous avez eu le privilège de le lire avant moi – et il est formidable. Simplement, singulièrement, formidable.
Alors merci Mnémos de m’avoir fait confiance cette fois encore, et surtout, merci d’avoir fait éclore à nouveau cet Œuf du dragon dans nos contrées. Merci. Voilà. Et cœur avec les doigts, même.
Parce que pendant quelques heures vitales, ce roman m’a rendu heureux. C’est putain de précieux, ça.

Au plaisir de vous recroiser.
En attendant, que votre avenir soit rempli d’étoiles. 😉

4 comments on “L’oeuf du dragon, Robert L. Forward

  1. tampopo24 dit :

    En te lisant, je suis plus que ravie de l’voir gagné à la dernière Masse Critique de Babelio !
    Hâte d’y plonger dedans 😀

    Aimé par 1 personne

    1. Laird Fumble dit :

      Bravo, j’espère sincèrement qu’il te plaira autant qu’à moi !

      Aimé par 1 personne

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