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Midnight City, Rozenn Illiano

The River – Blues Saraceno (extrait de l’album Dark Country 4)

Littérairement parlant, j’ai rencontré Rozenn Illiano grâce aux Editions CRITIC, chez qui j’avais demandé un SP du Phare au Corbeau, séduit par la couverture de Xavier Colette, me promettant une atmosphère à laquelle je savais que je n’étais pas habitué. En résulta une belle surprise, et de fil en aiguille, en suivant la promotion du roman sur les réseaux, je me retrouvai à la suivre, elle, sur ces mêmes réseaux. Entre mon appréciation du peu de travail que j’avais pu lire d’elle et sa personnalité, je me suis très vite promis de ne pas laisser passer d’opportunité de découvrir son univers et ses ouvrages, intrigué que j’étais par son ambition, son nébuleux « Grand Projet ».
Et, il y a quelque temps, voilà qu’elle propose à sa communauté d’envoyer gracieusement un exemplaire de Midnight City à quelqu’un. Fidèle à ma promesse, je lève ma main virtuelle, et je suis l’heureux élu. Et voilà que je reçois par la poste un exemplaire unique, magnifique, avec un petit post-it chaleureux qui colle un gros sourire sur mon visage. J’ai quand même une sacrée chance de vivre ce genre de moments.
Et là, je suis obligé d’ouvrir une parenthèse (très) personnelle. Avant d’entamer la lecture de Midnight City, il s’est passé deux choses. D’abord, la lecture de Trop Semblable à l’Eclair, un roman d’une richesse rare et d’une exigence qui m’auront laissé sur les rotules, avec le doute lancinant de pouvoir apprécier l’oeuvre qui viendrait après, la peur de ne pouvoir vraiment enchaîner avec le recul suffisant. Une sorte de syndrome de Stendhal littéraire que je n’aurais aucun problème à baptiser « syndrome de Palmer ».
Mais surtout, une nouvelle bataille avec mes démons intérieurs. Je ne m’étendrai pas plus que de raison sur le sujet, mais pour faire court, la dépression et tous ses symptômes, c’est épuisant, difficile, mais surtout, chez moi, ça force à mettre la vie en pause. Depuis le temps, j’ai appris à gérer, mais ça reste compliqué le temps que ça dure. Lire est une de mes bouées de sauvetage, une des rares choses à laquelle je sais me forcer pour essayer de reprendre le cours normal de ma vie.
Tout ça pour dire que quand j’ai commencé Midnight City, je n’étais pas nécessairement serein, entre la peur de ne pas savoir faire la part des choses et celle de me retrouver à devoir dire à une autrice pour qui j’ai beaucoup de respect que le bouquin qu’elle m’a très gracieusement offert était une déception.
Fort heureusement, il n’en est rien, même si il faut bien noter que cette lecture aura été mouvementée. Allons-y, que je vous explique tout ça.

Samuel Hugo, jeune auteur, a connu un succès fulgurant avec la publication de son premier roman et subit une crise existentielle qui l’empêche de même songer à l’écriture d’un second roman, jusqu’à sa rencontre avec un étrange mécène. En parallèle, nous suivons Cyan, ancien Rêvarchitecte dans la Cité de Minuit, qui a perdu son don de manipuler la matière des rêves et se retrouve pilote d’oniropostale, distributeur du courrier des Nocturnes, les habitants de la ville.
Le début de cette lecture a été difficile, à cause de deux facteurs précis ; d’abord, il a fallu que je me force un peu à m’y mettre, ce qui affectait ma concentration et mon attention à ce qui m’était raconté, et ensuite parce que les douleurs du personnage, dans certains aspects, m’étaient assez douloureuses à lire. L’angoisse de la page blanche pourrait facilement se transposer à une autre échelle, devenir une sorte « d’angoisse de la vie blanche ». La première partie de Midnight City sert autant à présenter ses personnages que ses futurs enjeux, et laisse donc la part belle à l’introspection, aux émotions brutes de ses personnages, la même qualité qui m’avait séduit dans Le Phare Au Corbeau, cette sincérité, palpable au travers des mots. Et si l’intrigue tardait un peu à venir à mes yeux, c’était probablement parce que j’avais du mal à accepter de me confronter à mes propres douleurs au travers de celles des protagonistes.
La preuve en est qu’à partir du moment où cette fameuse intrigue s’est lancée, je n’ai pas su lâcher le roman, m’emmenant très tard dans la nuit pour le finir d’une deuxième traite. Ce dernier travaille autour de la mise en abyme, entrelaçant ses différents arcs narratifs pour mieux explorer ses thématiques au travers de ce que les personnages ressentent à chaque étape. Rien de nouveau pour moi, lorsqu’on s’appuie sur des êtres d’encre et papier auxquels on essaie d’insuffler quelque chose d’organique, je suis toujours réceptif.
J’ai avant tout été séduit par le travail architectural du récit, structuré autour des différents univers qu’il dépeint, jouant sur nos attentes et sur les évidences avec une certaine subtilité. Et bien que cette intrigue soit souvent assez prévisible, le véritable talent de l’autrice est de jouer avec d’autres surprises, alternant habilement entre l’esquive de clichés et ce que l’on peut considérer comme logique de voir advenir.

Lorgnant régulièrement du côté du fantastique, le récit aurait facilement pu verser dans le sensationnalisme ou le spectaculaire, mais reste fermement ancré dans la réalité, tout du moins dans une cohérence humaine qui lui confère une véritable solidité. On sent bien que Rozenn Illiano s’est efforcé de faire réagir ses personnages de façons qui leur correspondraient avant de servir son histoire. Cette dernière s’articule toujours autour d’eux et elles, quitte à ne pas être aussi satisfaisante ou romanesque qu’elle aurait pu. Paradoxalement, ce côté terre-à-terre est extrêmement rafraîchissant, d’autant qu’il permet de se concentrer sur l’essentiel, évitant de se disperser dans les retournements de situation à outrance, qui auraient été facile à utiliser dans un récit de ce type, mais auraient sans aucun doute desservi la cause.
Et quelle cause. Mais la plus grande qualité de cet ouvrage, à mes yeux, sans aucun doute, c’est la profonde bienveillance qui s’en dégage. Au delà des personnages formidablement humains, avec leurs forces et leurs failles, écrites avec un soin confondant ; ce que raconte Rozenn Illiano, c’est la force des liens et du partage. Ces échanges qui peuvent n’avoir l’air de rien, ces petites choses que l’on se donne sans y penser, qui sont autant de briques qui construisent nos maisons communes, ces foyers, ces communautés de pensée qui nous permettent de nous situer, d’avoir des phares dans la tempête. En insérant à son récit quelques détails d’importances variables, qui auraient facilement pu être considérés comme superflus, avec la bonne dose d’affect et une belle intensité, l’autrice réussit à la fois à donner de la consistance à ses personnages et à son intrigue ; créant une véritable synergie donnant encore plus de poids et de force à son message.

Mon histoire avec ce roman, quelque part, c’est avant tout celle d’une rencontre et d’un heureux hasard. Je ne saurais jurer que dans d’autres circonstances je l’aurais autant apprécié qu’aujourd’hui. Sans lui renier la moindre de ses qualités, qui sont nombreuses, force est de constater que dans les conditions de sa lecture, il a particulièrement bien su me parler. J’aime à croire que cela aurait été le cas dans un moment plus paisible.
Mais fi de ces interrogations. Le roman est bon, et surtout il est beau, emprunt d’une très jolie atmosphère à la fois sombre, mélancolique et optimiste, d’une délicatesse rare, d’une bienveillance et d’une humanité dont nous n’avons que trop besoin. Il nous ramène à l’essentiel, notre proximité aux autres, à ce que l’art peut créer de plus beau chez nous et entre nous. Nul doute que désormais je ferais plus que me promettre de me pencher sur les œuvres de Rozenn Illiano, et qui sait, peut être même qu’un jour, j’aurais le plaisir de lui acheter un de ses livres plutôt que de les recevoir gratuitement.

Au plaisir de vous recroiser.
En attendant, que votre avenir soit rempli d’étoiles. 😉

4 comments on “Midnight City, Rozenn Illiano

  1. muriellerochebrunet dit :

    La lecture de cette chronique/critique n’a rien eu de laborieux, bien au contraire. Elle sert manifestement merveilleusement le fonds et la forme de cette oeuvre, avec la bienveillance juste bien dosée et ciblée, étant donné le contexte et le sens manifeste du texte. Nous en avons plus que besoin, ordinairement et plus encore actuellement… et j’ai maintenant bien envie de profiter de cette humanité littéraire…

    Aimé par 1 personne

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