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La Maison des Épines, Rozenn Illiano

Bad Dream – Cannons (extrait de l’album Fever Dream)

[Chronique écrite en novembre 2022, certains de ses éléments peuvent ne plus être aussi pertinents.]

Privilège, Rozenn Illiano, Le Grand Projet, Avant-Première : on se sait, plus la peine d’en faire des caisses, à force. Toujours un honneur, toujours un plaisir, que de recevoir un roman d’une de mes autrices favorites avant publication officielle, comme c’est toujours un exercice singulièrement plaisant que de rédiger ces chroniques ; ces romans s’inscrivant dans un courant littéraire unique, de même que dans un projet littéraire unique, j’ai toujours des choses à en dire, du grain à moudre. (Même si je prétends parfois le contraire pour me donner un genre.)
Et aujourd’hui, la chronique va être encore un peu plus singulière que d’habitude : parce que si, comme d’habitude, j’ai été séduit pas la démarche littéraire de Rozenn Illiano, autant que convaincu par son travail architecturalo-littéraire, je dois confesser, tout de même, une (toute) petite fatigue.
Explications à venir, comme de bien entendu.

Le Cirque Beaumont n’est pas un cirque comme les autres. Bien au-delà de ses numéros ayant fait sa renommée au niveau mondial, cet assemblage de personnalités hétéroclites composant une famille à part entière poursuit un autre but : retrouver, à l’aide des dons magiques liés au rêve dispersés entre ses membres, d’autres personnes douées des mêmes talents, dont l’enfant-clef. En effet, une vieille prophétie courant dans la famille dit qu’un jour cet enfant permettra d’apaiser le rêve enfermé dans la demeure de Blackthorn Hill, héritage de la fondatrice du cirque. Or, les événements sur place se précipitent, rendant cette prophétie, dont certains commençaient à douter, plus menaçante que jamais.

Alors pour une fois, je ne vais pas vraiment procéder par étapes, détailler ce que j’ai aimé ou non dans un certain ordre d’importance ; parce que ça ne correspondrait pas vraiment à mon expérience de lecture. Ma découverte de cette Maison des Épines a plutôt été un grand 8, enchainant les confirmations attendues, les bonnes surprises et les choix me rendant plus circonspects. Dans un premier temps, évidemment, on retrouve dans ce roman les plus grandes qualités de Rozenn Illiano, les choses qui maintenant me semblent absolument acquises lorsque j’ouvre un de ses romans : c’est ciselé, émotionnellement chargé, élégant et sensible. Nos personnages ont du souffle, des sentiments, des relations complexes et des histoires à l’avenant, de même que l’histoire qui nous est contée a la force de l’indépendance en même temps que la subtilité nécessaire pour effectuer des rappels malicieux au reste du Grand Projet. Rien de neuf là-dedans, c’est toujours aussi plaisant et confortable malgré l’habitude : cette autrice est une démiurge efficace et diablement talentueuse. J’ai beau le savoir, je suis toujours impressionné par cet aspect de son travail, d’autant plus dans cet opus en particulier, où le jeu architectural est plus précis et solide que jamais, s’inspirant sans doute des travaux effectués dans D’Hiver et d’Ombres pour éviter le moindre risque – même fugace – de rendre l’intrigue confuse ou brouillonne.

Alors voilà, j’ai très vite été en terrain conquis à beaucoup d’égards, ce qui, paradoxalement, a peut-être été la raison d’un premier grippage de la machine. On passera à cet égard, sur le fait que je sature à un niveau intime des grandes tragédies mélanconliques ces derniers temps, ne m’aidant pas à progresser aisément dans un récit tel que celui-là, puisque clairement construit comme une grande tragédie mélancolique : c’est juste vraiment pas de bol sur le timing, Rozenn Illiano n’y est pour rien, c’est mon problème, pas le sien. Par contre, là où les « torts » – imaginez s’il vous plait mes doigts faire les guillemets en même temps pour une emphase maximum – sont peut-être un peu plus partagés, c’est au niveau des thèmes convoqués ; la fatigue évoquée plus haut.
Peut-être – sans doute – est-ce lié à ma saturation personnelle des thèmes tragiques, comme au fait que cette autrice est celle que j’ai le plus lu et chroniqué sur le blog ces deux dernières années, mais toujours est-il que j’ai retrouvé un peu trop de motifs familiers dans ce récit pour réussir à m’y perdre comme dans les précédents. C’est l’inconvénient de m’etre jeté sur autant d’histoires issues du Grand Projet dans un temps si restreint, sans doute, chacune étant encore bien fraîche dans ma tête. Malgré mon profond et sinccère attachement à tout ce qui le constitue, vient un moment où j’ai peut-être besoin d’autre chose que ce rapport là au rêve et à la matière de l’oniro-fiction.

Ce qui m’amène à un autre aspect paradoxal de mon appréciation du roman : sa foisonnance, sa densité. J’ai déjà dit à quel point j’étais admiratif du travail de Rozenn Illiano pour ne rien laisser au hasard dans son travail, parvenir à rendre tout son univers cohérent, le tout sans faire transparaître l’effort. C’est évidemment toujours le cas. Mais, pour une fois, je dois bien dire, aussi, que cette fois-ci, je trouve peut-être qu’elle en a un peu trop fait. Peut-être que pour cette fois, j’aurais pris un récit un peu plus resserré, laissant plus de place aux ombres, aux ellipses, prenant moins son temps pour absolument tout montrer, tout expliquer. Malgré l’excellence de l’architecture narrative soutenant l’ensemble et l’empêchant de s’écrouler sous son propre poids, j’ai quand même trouvé que cette fois-ci, il y en avait peut-être un peu trop, à la limite de l’indigestion. Trop de personnages, trop d’intrigues croisées demandant à se conclure, de relations interpersonnelles à expliciter, d’allers et retours temporels, je ne saurais dire. Peut-être que pour une fois, Rozenn Illiano aurait pu être un peu plus pudique et jouer sur les non-dits, là où d’habitude sa force est précisément de faire les choses simplement. Mais tout comme je crois que Less is More, je crois aussi qu’en littérature, trop est mieux que pas assez. Un paradoxe de plus.
Peut-être que pour une fois, aussi, les circonstances ont finalement réussi à m’empêcher de vraiment apprécier le travail d’une autrice que je ne cesserais jamais d’admirer.

Parce que je peux bien dire ce que je veux et tenter d’expliciter au mieux mon ressenti à la conclusion de cette lecture, le fait est que je suis arrivé au bout sans jamais avoir eu à lutter avec le texte autant qu’avec moi-même : la période est vraiment compliquée pour un texte tel que celui-là pour moi, j’insiste. Entre la tristesse et les regrets empoissant le moindre paragraphe et le poids terrible d’une malédiction centenaire sur les épaules d’une famille qui mérite clairement mieux, je manquais de lumière comme d’oxygène.
Demeure malgré ça que le talent et le travail qu’il suggère étaient là, comme la réalisation d’un projet toujours aussi ambitieux, avec les moyens adéquats. Si je ne peux effectivement pas attester d’un enthousiasme débordant de ma part comme à la lecture d’un Elisabeta ou un Night Travelers, c’est, je pense, avant tout, parce que je n’étais pas réceptif à un récit de ce genre en ce moment, et parce que pour une fois, peut-être à cause des échos d’un Érèbe, je n’ai pas été aussi surpris qu’auparavant.
La Maison des Épines est bon. Voire très bon ; il représente une nouvelle synthèse des ambitions et des talents d’une autrice toujours aussi unique, mais que je connais peut-être un peu trop bien pour pouvoir en profiter à fond en ce moment.
Je me contenterais donc de ranger ce récit aux côtés d’autres romans du Grand Projet que j’ai aimés mais que je ne conseillerais peut-être pas en priorité, que je ne manquerais cependant pas de relire un jour avec un nouveau plaisir, alimenté de connaissances renouvelées. Et d’attendre les publications à venir avec la même impatience enthousiaste. Ça me va.

Au plaisir de vous recroiser.
En attendant, que votre avenir soit rempli d’étoiles.;)

3 comments on “La Maison des Épines, Rozenn Illiano

  1. L'ours inculte dit :

    J’comprends que ça puisse sembler redondant si on enchaine tout en peu de temps, pour le moment ça me dérange pas trop, j’m’y attendais et effectivement y’a pas mal d’échos avec Erèbe

    Aimé par 1 personne

    1. Laird Fumble dit :

      Exactement ce que je me suis dit, donc je suis pas déçu ou quoi : au moins le sentiment de « moins bien » est aussi fugace qu’explicable. Sans parler d’être vraiment relatif.

      J’aime

  2. Lullaby dit :

    Je note de le lire plus tard (j’ai tellement aimé Erèbe !), ça presse d’autant moins que j’ai Night Travelers, D’hiver et d’ombre et Onirophrénie qui traînent dans ma PAL. Mais je lirai cette Maison aux épines !

    Aimé par 1 personne

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